Obligations d'entreprises: éviter les sociétés exposées au private equity

04/10/2010 - 11:05 - Option Finance

(AOF / Funds) - "En 2010 et jusqu'à présent, pour les investisseurs en obligations d'entreprises, les services de collectivités n'ont pas représenté un bon placement. Cela s'applique particulièrement aux obligations High Yield du service public américain. Depuis le début de l'année, les titres du secteur ont baissé de plus de 3%. En comparaison, les autres secteurs sont presque tous parvenus à dégager des chiffres positifs et l'indice US High Yield a enregistré un gain de 10,3% (sur la base des données recueillies à la mi-septembre)", affirme Robeco. Le gestionnaire précise éviter "les sociétés risquant de subir les conséquences d'une reprise par des investisseurs du capital-investissement dont la tendance est de grever leurs cibles de dettes substantielles". "Notre portefeuille ne contient (...) pas davantage de titres de sociétés dont les contrats obligataires sont dépourvus des clauses nécessaires pour protéger les détenteurs d'obligations." "L'industrie américaine du service des collectivités est structurée de manière très différente de son équivalent européen. En Europe, la plupart des titres de cette industrie constitue des placements du segment Investment Grade. Cela tient aux liens étroits qui les unissent - aujourd'hui encore - à l'Etat. De plus, les activités du secteur sont soumises à une réglementation importante. Enfin, la production d'électricité et sa vente aux consommateurs européens ne font qu'un, ce qui se traduit par des conditions relativement stables, pour le plus grand bénéfice des flux de trésorerie et de la rentabilité." "A l'opposé, les entreprises américaines de services publics sont souvent indépendantes et ne jouissent pas d'un cadre opérationnel aussi stable. Ils sont en fait désignés sous le nom d'IPP (independent power producers) et leurs activités ne sont ni constantes, ni bien réglementées. Ces entreprises ne produisent que l'électricité qu'elles vendent aux distributeurs qui fournissent le consommateur final. De ce fait, elles dépendent directement de la quantité et du prix de l'électricité qu'elles écoulent. De nombreux producteurs d'électricité indépendants sont ainsi lourdement endettés, même s'ils ont été repris par des sociétés de capital-investissement." "Un autre élément du marché actuel de l'électricité concerne les pressions qui s'exercent sur les bénéfices des centrales au charbon. Tout comme le prix du pétrole, celui du charbon a progressé régulièrement depuis le point bas occasionné par la crise du crédit au début de 2009. Alors que les charges des centrales au charbon ne cessent de croître, les prix de l'électricité sont en baisse depuis le milieu de 2008. En règle générale, les prix des différents types d'énergie sont fortement corrélés. La chute du prix de l'électricité aux Etats-Unis est la conséquence du ralentissement économique qui a entraîné une réduction de la consommation d'électricité et provoqué des surcapacités de production." "Les réserves et niveaux de production de gaz de schiste ont augmenté sensiblement en Amérique du Nord. Le gaz naturel traditionnel est extrait principalement de sols sableux; le gaz de schiste est extrait de schistes bitumineux. Grâce aux avancées techniques, le gaz de schiste est actuellement extrait à des prix de revient très inférieurs à ceux qui s'imposaient encore récemment, ce qui constitue une autre cause importante de la baisse des prix du gaz. Le gaz de schiste représente actuellement 15% à 20 % de la production américaine de gaz. Les centrales électriques au gaz jouent souvent un rôle important dans l'établissement du prix de l'électricité. Cela s'explique par le fait que, dans de nombreuses parties des Etats-Unis, ces fournisseurs d'électricité vendent au prix marginal. Ainsi, le prix du gaz détermine également, le plus souvent, celui de l'électricité." "Cela n'a pas manqué d'exercer des pressions sur la rentabilité des centrales au charbon - et sur les obligations haut rendement des entreprises du secteur, dont deux en particulier : TXU et Dynergy. TXU est une entreprise d'électricité texane qui a été reprise par les sociétés de capital-investissement KKR et TPG dans le cadre d'acquisitions par emprunt en 2008. Dynegy, de son côté, a accepté d'être reprise par Blackstone, un autre groupe de capital-investissement. La situation Dynegy/Blackstone illustre très bien trois aspects clés de ce segment. Premièrement, elle montre la sagacité financière des sociétés de capital-investissement. Deuxièmement, elle braque les projecteurs sur les problèmes actuellement rencontrés par les centrales au charbon. En troisième lieu, elle explique pourquoi il faut éviter les sociétés de capital-investissement recourant à l'emprunt et à faibles notations financières, et les raisons pour lesquelles nous avons été sous-pondérés en obligations à haut rendement IPP depuis un certain temps." "Comme Dynegy produit de l'électricité à la fois à partir du gaz et du charbon, ses actions avaient atteint leur point le plus bas depuis huit ans. L'OPA (une offre publique d'achat) de Blackstone sur Dynegy correspondait à une surcote de plus de 60 % par rapport au cours de l'action. De ce fait, le groupe était en mesure d'acheter toutes les actions de la société pour 540 millions de dollars, montant qui, bien sûr, couvrait également les dettes de Dynegy. Les contrats obligataires ne contenaient pas de dispositions accordant des droits supplémentaires aux détenteurs d'obligations pour protéger leurs intérêts dans l'éventualité d'une reprise de la société. Blackstone en a profité en revendant les centrales au gaz de Dynegy (dont la valeur avait augmenté de manière très sensible) pour 1,4 milliard de dollars à la société d'énergie NRG au moment même de l'acquisition. Pour Blackstone, ce marché s'est donc traduit par un joli profit de 800 millions de dollars. Blackstone s'est retrouvé avec un portefeuille de centrales au charbon peu rentables et grevées de dettes relativement importantes." "En fait, ce que ces derniers ont obtenu était une option gratuite sur la montée des prix de l'électricité. Si ces prix remontent effectivement, ces investisseurs en profiteront. Mais s'ils ne remontent pas, les détenteurs d'obligations Dynegy auront un problème. Ils pourraient même ne pas être remboursés entièrement de leurs titres. C'est pour cette raison que les obligations Dynegy ont chuté à l'annonce de cette transaction. Comme les sociétés de capital-investissement privilégient les intérêts des actionnaires, les détenteurs d'obligations en pâtissent. Cela se vérifie tout particulièrement si les clauses des obligations donnent une grande liberté aux actionnaires." AUT/ALO