Allocation d'actifs : les prévisions trimestrielles des gérants

05/10/2010 - 10:28 - Option Finance

(AOF / Funds) - Les difficultés qu'éprouvent les gérants à définir une allocation d'actifs sont toujours aussi grandes pour le trimestre à venir. Si les actions des pays développés sont bon marché et les entreprises en bonne santé financière, les gestionnaires d'actifs intègrent cependant le scénario d'une croissance faible et d'une probable rechute boursière. Pour le trimestre à venir, l'Europe rassure cependant davantage les gestionnaires d'actifs que les Etas-Unis. Un consensus positif parvient ainsi à se dégager sur les actions européennes, jugées sous-évaluées, avec près de 58 % des répondants qui les surpondèrent dans leur allocation d'actifs contre seulement 22 % au trimestre précédent. A l'inverse, les craintes liées à l'économie américaine - certains gérants redoutant que les politiques monétaires et budgétaires accommodantes ne s'essoufflent particulièrement dans cette zone - conduisent 17 % des gérants qui étaient positifs sur les actions américaines trois mois plus tôt à être neutres pour les trois prochains mois, voire négatifs. Les actions japonaises sont elles aussi en perte de vitesse dans les allocations, 38 % des gérants interrogés les sous-pondérant contre moins de 9 % en juin dernier. A l'inverse, la croissance des zones émergentes conduit toujours la majorité des gérants à s'y intéresser, tant pour les actions que pour les dettes souveraines. De même, les produits de taux gardent la cote pour le trimestre à venir, surtout le crédit, les obligations high yield et la dette émergente. Enfin, concernant les changes, alors que trois mois auparavant la majorité des gérants anticipaient une baisse de l'euro, la finalisation du fonds européen de stabilisation financière en juin dernier pour couvrir les besoins d'emprunts des pays périphériques en difficulté a rassuré sur la solidité de la monnaie unique. Ils ne sont ainsi plus que 22 % des gérants à sous-pondérer l'euro dans leurs allocations, contre 74 % au trimestre précédent, tandis que 30 % n'hésitent plus à le surpondérer. A l'inverse, le billet vert est devenu moins attractif : 30 % des gestionnaires le surpondèrent pour les mois à venir, contre 50 % au trimestre précédent.

Actions pays émergents

L'avis de James Syme, gérant du fonds Baring Global Emerging Markets Fund, Barings

"Nous pensons que la hausse des marchés émergents est durable et que les valorisations sont attractives puisqu'elles sont en dessous de leur moyenne historique et à leur niveau de 2002, explique James Syme, gérant du fonds Baring Global Emerging Markets Fund chez Barings. La croissance des pays émergents repose en partie sur la demande intérieure : ils s'urbanisent de plus en plus et le niveau de revenu par habitant augmente. Ces pays dépendent donc moins de leurs exportations et voient leur croissance dopée par l'expansion d'une classe moyenne domestique. De plus, alors que les pays développés font face au vieillissement de leur population, dans les pays émergents la population est jeune, en plein essor et elle contribue à la hausse du PIB. La robustesse de leur balance des paiements et leur capacité à emprunter est une autre clef de leur croissance. Actuellement, nous favorisons les pays qui ont une demande intérieure forte, de faibles taux d'intérêt, une urbanisation et une industrialisation croissantes comme la Chine, la Turquie, la Russie, le Mali ou le Pérou. Au niveau sectoriel, nous privilégions la consommation, les finances et les télécoms."

Obligations souveraines

L'avis d'Emeric Challier, responsable de la gestion Global Macro, Avenir Finance Investment Managers

"La BCE semble s'engager sur une orientation très différente des autres grandes banques centrales (Etats-Unis, Royaume-Uni et Japon), avec un objectif de sortie de sa politique de soutien, mise en place en 2008 et 2009, dès le premier trimestre 2011, affirme Emeric Challier, responsable de la gestion Global Macro d'Avenir Finance Investment Managers. Cette perspective n'est pas rassurante au moment où de nombreux pays de la zone euro (Grèce, Irlande, Portugal, Espagne et Italie) sont en difficulté, avec des primes de risque en forte hausse depuis un an. Nous restons fondamentalement optimistes sur la zone euro, en privilégiant les Etats qui prennent les décisions nécessaires pour réduire leurs déficits et qui poursuivent une politique de réduction crédible comme l'Allemagne, la France, les Pays-Bas et l'Autriche. Nous sommes plus prudents sur la Belgique, l'Espagne et l'Italie, et nous n'investissons pas pour l'instant sur la Grèce, l'Irlande et le Portugal."

High yield

L'avis d'Alexandre Hezez, responsable de la gestion, Convictions AM

"Du fait des difficultés à augmenter les impôts et à procéder à des réformes structurelles, les Etats-Unis vont adopter une politique de taux d'intérêt réels inférieurs au taux de croissance pour se désendetter, explique d'Alexandre Hezez, responsable de la gestion de Convictions AM. Par conséquent, nous anticipons des taux monétaires bas pour encore longtemps et la reprise de l'inflation. Dans ce contexte, nous pensons que l'investissement va s'accélérer, ce qui entraînera une reprise, certes faible mais positive, de la consommation aux Etats-Unis et profitera aux entreprises. Nous privilégions donc les titres émis par les entreprises (actions américaines et européennes) et les actifs de rendement comme les obligations high yield. En Asie, la consommation et l'investissement urbain se développent, nous privilégions donc les entreprises qui sont impactées par la consommation interne comme les petites et moyennes capitalisations émergentes, ainsi que les entreprises de l'OCDE qui exportent une part significative de leur chiffre d'affaires dans ces pays."

Actions Europe

L'avis d'Yves Maillot, directeur des investissements et de la gestion actions, Robeco Gestions

"Les valorisations des actions des pays développés sont attractives et, d'un point de vue fondamental, les entreprises européennes se portent bien, tant aux Etats-Unis qu'en Europe, explique Yves Maillot, directeur des investissements et de la gestion actions de Robeco Gestions. Cependant, les marchés soufflent le froid et le chaud depuis le début d'année : ils peuvent tout aussi bien retrouver leur haut niveau d'avril que connaître de nouveau un creux. C'est pourquoi nous sommes neutres à négatifs sur les actions des pays développés. Nous avons cependant une préférence pour les sociétés américaines par rapport aux européennes. Le point central de notre réflexion en termes d'allocation tactique sur les actions se situe actuellement sur les marchés des changes : pour jouer la poursuite de la hausse de l'euro-dollar, nous privilégions les actions américaines (en nous couvrant contre le risque de change). Aux Etats-Unis, comme en Europe, nous donnons la préférence aux entreprises dont le chiffre d'affaires est corrélé à la santé des marchés émergents."

Actions Etats-Unis

L'avis de Maryannick Plomion, gérante diversifiée, Allianz GI Investments Europe

"Nous étions neutres lors du trimestre précédent. Nous sous-pondérons désormais les actions américaines dans le cadre d'une politique prudente d'allocation globale en actifs risqués, explique Maryannick Plomion, gérante diversifiée chez Allianz GI Investments Europe. Le rebond des économies développées, qui a été soutenu par des politiques monétaires et budgétaires très accommodantes, s'essouffle, particulièrement aux Etats-Unis. Le marché immobilier américain subit l'impact de la fin des incitations fiscales, alors même que les ménages n'ont pas encore achevé leur désendettement et que la phase de normalisation des stocks touche à sa fin (ventes des logements neufs 0 % en août, après - 7,7 % en juillet). Concernant les actions, les attentes des analystes nous semblent trop optimistes (15 % de croissance des bénéfices en 2011 après déjà 30 % en 2010), compte tenu du fait que les facteurs explicatifs de la reprise, comme les allégements fiscaux ou le restockage des entreprises, disparaissent. L'économie américaine entre dans une phase de ralentissement (1,7 % de croissance attendue en 2011, contre 2,4 % pour le consensus). Nous préférons donc rester à l'écart des actions américaines et privilégier celles de la zone euro."

Actions matières premières

L'avis de David Field, gérant du fonds Carmignac Commodities, Carmignac Gestion

"L'émergence de la Chine a entraîné le marché des matières premières dans une spirale haussière qui devrait se poursuivre sur les cinq à dix prochaines années, anticipe David Field, gérant du fonds Carmignac Commodities chez Carmignac Gestion. Le dynamisme de la Chine par rapport au reste du monde a considérablement changé la donne. La Chine représentait 25 à 30 % de la demande mondiale en matières premières, contre près de 40 % aujourd'hui, voire plus pour certaines matières premières, notamment l'acier, le zinc, le plomb et le nickel. Ce phénomène a eu un impact bien plus marqué qu'attendu sur la demande à court et moyen terme et a augmenté le risque de pénurie d'offre à long terme pour certaines matières premières. La tendance à la modernisation observée dans d'autres pays, comme le Brésil et l'Inde, va aussi renforcer l'impact de la dynamique chinoise sur l'augmentation de la demande des matières premières et la régulation de l'offre des ressources sur le marché, ce qui entraînera une hausse du prix des matières premières." Floriane Tedoldi AUT/AUT