Les gérants actifs sous-performent lorsqu'ils ne sont pas assez actifs

05/10/2010 - 12:17 - Option Finance

(AOF / Funds) - "L'inefficience d'un marché, la forte volatilité d'une classe d'actifs et la faible concentration d'un indice s'accompagnent d'une forte dispersion des rendements de fonds activement gérés et favorisent donc la génération d'une surperformance significative de la part du gérant", note la dernière étude du cabinet Fidelity, ajoutant que "(...) le choix entre gestion passive et gestion active dépend du contexte d'investissement et, au premier chef, du degré d'efficience des marchés". "La décennie qui s'achève a vu croître de manière exponentielle le marché des fonds indiciels, dont celui des ETF (Exchange Traded Funds : fonds négociables en bourse) en particulier, ravivant le débat qui oppose la valeur ajoutée de la gestion passive et celle de la gestion active. La première offre à bas coût une solution qui répond aux besoins d'investisseurs de plus en plus nombreux, quand la seconde voit sa promesse principale, la génération d'alpha, de plus en plus contestée. Au coeur du débat se pose souvent la question du degré d'efficience des marchés, et une remise en question de la capacité des gérants dits actifs à générer une surperformance suffisamment significative pour compenser le surcoût de la gestion active." "L'hypothèse d'efficience des marchés (HEM) part du principe que sur un marché très actif, où des acteurs parfaitement informés et rationnels recherchent un profit maximum, les titres sont appréciés de façon appropriée et reflètent intégralement toutes les informations disponibles à tout moment. Si cette hypothèse est juste, alors il faut logiquement en conclure qu'aucune étude ni analyse ne peuvent générer de surperformance. Par conséquent, les investisseurs devraient simplement se contenter de méthodes d'investissement dites passives." "Selon Fidelity, l'HEM est un concept contestable, que l'on peut remettre en cause en lui opposant une série de faits empiriques avérés. De nombreuses études étayent l'existence de biais psychologiques qui ne manquent pas de perturber le comportement de type rationnel présumé par l'HEM, comme l'aversion de l'incertitude, c'est-à-dire une peur excessive des situations aléatoires, ou encore l'exubérance irrationnelle, notion créée par Alan Greenspan pour décrire l'excès d'optimisme des marchés lors de la bulle financière de la fin des années 1990." "En outre, il existe une multitude de preuves relatives à l'existence d'anomalies des marchés, qui ne devraient pas exister si les marchés étaient véritablement efficients. Plus précisément, l'une des conséquences logiques de l'HEM est que le cours des actions devrait suivre une marche aléatoire, en fonction de laquelle les prix futurs n'ont aucune corrélation avec les prix antérieurs. Or, de nombreuses études font apparaître l'existence de toute une série de modèles pour décrire le cours des actions." "L'étude menée par Fidelity sur la gestion active montre qu'une augmentation des niveaux de volatilité transversale (écart de performance entre les titres à un moment T) aboutit souvent à une plus grande dispersion des rendements des gérants de fonds (...) Pour Fidelity, cela signifie qu'en période de forte volatilité, les gérants actifs et compétents ont davantage l'opportunité de se distinguer positivement grâce à de meilleures performances. En particulier, pendant les périodes de volatilité accrue, il semble que la prime de rendement émanant des décisions des gérants soit plus élevée. Ainsi, tandis qu'une gestion active est plus coûteuse qu'une gestion passive, le produit généré par ce surcoût peut être optimisé pendant les périodes de forte volatilité." "Par ailleurs, l'étude de Fidelity indique que le potentiel d'alpha des gérants est lié à la concentration des actifs sur les marchés où ils opèrent. Plus exactement, le potentiel de rendement est plus élevé pour les gérants dont la performance est mesurée sur la base d'indices de référence faiblement concentrés. Pour mesurer le degré de concentration, Fidelity a utilisé un mesure de dispersion statistique appelée coefficient Gini. Ce terme est utilisé en économie pour décrire le niveau d'inégalité des revenus entre différentes populations, la valeur 0 exprimant l'égalité totale et 1 indiquant une totale inégalité. L'utilisation de cette mesure fait apparaître que la capacité de production d'alpha a tendance à augmenter avec les fonds assortis d'un faible coefficient Gini (c'est-à-dire avec les indices de référence moins concentrés) et vice-versa pour les coefficients Gini plus forts." "En examinant le rendement trimestriel de la base de données Lipper Global North America par rapport à l'indice MSCI USA, Fidelity a constaté qu'il y avait une relation négative entre les modifications des coefficients Gini de cet indice et l'alpha des gérants. En d'autres termes, lorsque la concentration des actifs de l'indice MSCI USA augmente, la capacité des gérants à générer de l'alpha diminue." "Le potentiel de surperformance des gérants varie considérablement en fonction des différents marchés et classes d'actifs. En particulier, l'étude menée par Fidelity souligne que les rendements des gérants actifs sont relativement plus dispersés sur les marchés émergents et les classes d'actifs à faible capitalisation. Une explication plausible de ce phénomène réside dans le fait que ces marchés sont moins efficients, moins couverts par la recherche fondamentale, et offrent peu d'informations disponibles. Par conséquent, les gérants actifs les plus à même de surmonter ces contraintes peuvent être récompensés par des primes de rendement supérieures." "Cette dispersion accrue du rendement des gérants s'explique aussi par la tendance intrinsèque à une plus forte volatilité de ces classes d'actifs." "En 2009, KJ Cremers et Antti Martijn Petajisto de la Yale School of Management ont publié un article mettant en avant leur concept de risque actif (active share), en démontrant que ce dernier pouvait servir à prédire la performance des gérants actifs. Le risque actif est calculé en additionnant les positions nettes absolues d'un fonds par rapport à son indice de référence, puis en divisant le résultat par deux." "Sur la base de cette méthode de calcul, Cremers et Petajisto ont pu segmenter l'univers des fonds américains en 3 : les fonds ayant un risque actif supérieur à 80%, considérés comme des stock-pickers ; les fonds dont le risque actif représente 20 à 60%, qui sont classés comme closet indexers, dont la gestion est benchmarkée mais active ; et ceux dont le risque actif est inférieur à 20%, considérés comme des fonds purement indiciels." "En examinant le risque actif de 2.647 fonds d'actions américains, l'étude a confirmé l'idée selon laquelle les petits fonds ont davantage tendance à être gérés activement que les grands fonds. Par ailleurs, on note une forte proportion des closet indexers. En effet, si l'ensemble des fonds était considéré comme un fonds unique, le risque actif cumulé ne serait que de 30%. La conclusion la plus édifiante de l'étude de Cremers et Petajisto est la suivante : les différents niveaux de risques actifs ont une valeur prédictive en termes de rendement des fonds, les fonds ayant le risque actif le plus élevé surperformant de façon significative leurs indices de référence, que ce soit sur une base brute ou nette." "Plus précisément, les fonds appartenant au quintile le plus élevé des paris actifs surpassent leurs indices de référence respectifs de 1,13% net de frais. Dans le cadre du débat entre gestion active et gestion passive, l'implication de ce résultat est très claire : de nombreux gérants dits actifs sous-performent tout simplement parce qu'ils ne sont pas suffisamment actifs. D'autre part, les gérants qui s'appuient sur leurs convictions pour sélectionner des actions de façon significativement différente par rapport à leur indice sont plus à même de surperformer." AUT/ACT