JP Morgan AM garde sa surpondération de long terme sur les émergents

22/11/2010 - 17:05 - Option Finance

(AOF / Funds) - "La semaine fut éprouvante pour les États-Unis et la Chine, confrontés à des défis économiques. Les États-Unis ont subi une hausse brutale des rendements des bons du Trésor à 2,96% en milieu de semaine, supérieurs de près de 60pb au point bas atteint avant la deuxième phase d'assouplissement quantitatif (AQ2). La publication de l'inflation core, à 0,6% sur un an (son plus bas depuis au moins 60 ans), a permis une détente vendredi", relève JP Morgan AM. "A l'opposé, la Chine fait face à une inflation supérieure à l'objectif officiel et qui menace de continuer à croître au vu des afflux de capitaux et de l'accumulation des réserves de change. Vendredi, la Chine a encore augmenté son taux de réserves obligatoires de 50pb, retirant 350 milliards de yuans du système bancaire." "La bonne nouvelle pour les États-Unis est que la hausse des rendements est plus due à une hausse des taux réels qu'à des anticipations inflationnistes. Le marché obligataire anticipe une meilleure situation économique, les rendements réels à 10 ans ayant doublé à 0,8% sur le mois. Mais la correction est préoccupante et ne faisait pas partie du scénario de l'AQ2, d'autant plus que les taux des crédits hypothécaires ont aussi augmenté. Le niveau de 2,96% est un support clé pour les bons du Trésor à 10 ans qu'il serait dangereux de casser. Mais les conditions d'un nouveau marché baissier ne sont pas réunies, malgré le niveau des valorisations du côté de l'offre. Selon nous, la correction de la partie longue de la courbe des taux, concomitante à la baisse des actions, traduit plus un ajustement des positions suite à l'AQ2 qu'un mouvement vraiment inquiétant." "Les marchés émergents devraient-ils bénéficier d'une prime par rapport aux pays développés ? Bien qu'ayant longtemps travaillé sur les zones EMEA et Asie, je pense que ces marchés méritent une décote car leur croissance plus rapide est aussi plus volatile, mais il s'agit d'une question difficile. Les pays émergents sont considérés comme les principaux bénéficiaires de l'AQ2, et devraient voir un afflux de capitaux compte tenu de devises jugées sous-évaluées. Fin octobre, les émergents présentaient un ratio cours/valeur comptable de 2,06 et un ratio cours/bénéfices anticipé de 11,4. Ils étaient alors valorisés à 104,1 selon notre indice de valorisation composite, une moyenne géométrique pondérée de quatre mesures simples, chaque indice étant rebasé sur la moyenne de 1996-2009. En général, le fait que l'indice de valorisation absolue dépasse 120 est un signal d'alarme. Pour certains, le signal est un ratio cours/valeur comptable de plus de 2,5." "(...) en absolu, les marchés émergents sont valorisés en ligne avec la moyenne de long terme, de même qu'en termes de ratio cours/valeur comptable. Sur la même base, les marchés développés sont 26% en dessous de leur moyenne de long terme. Ainsi, notre indicateur de valorisation relative semble avoir atteint un niveau extrême. Pour un investisseur multi-actifs, cet écart de valorisation relative n'est pas trop inquiétant. Le retour sur fonds propres (ROE) des marchés émergents est supérieur à celui des marchés développés avec de meilleurs fondamentaux macro-économiques, des systèmes bancaires sains et un environnement favorable aux actionnaires minoritaires étrangers. Une prime de valorisation pourrait donc bien se justifier." "Mais nous serions inquiets si les valorisations des marchés émergents devaient atteindre des extrêmes ou si d'autres facteurs affectaient ces ROE plus élevés. Nous pouvons imaginer deux scénarios. Dans le premier, l'AQ2 générerait de l'inflation dans le monde émergent, érodant les marges et les ROE. A l'exception de la Chine, ce n'est pas une source d'inquiétude majeure. Dans le deuxième, le ralentissement mondial serait tel qu'il se traduirait par une baisse sensible des prix des matières premières, affectant les bénéfices et les ROE." "En clair, nous ne sommes pas très inquiets au sujet de cette prime de valorisation. L'ironie est que, si les actions devaient encore s'apprécier sur les 3 à 6 prochains mois en cas de ruée des investisseurs pour reconstituer leurs positions actions, les marchés développés pourraient être privilégiés, étant plus liquides et sous-évalués. Nous maintenons notre surpondération de long terme sur les marchés émergents." "La fin de semaine a vu la visite du FMI et l'attente d'un plan de sauvetage, la communauté internationale s'efforçant de résoudre les problèmes de l'Irlande. Jusqu'à présent, le marché des CDS estimait à 1 chance sur 3 la probabilité d'un défaut irlandais sur les cinq prochaines années, à l'instar du Portugal et près de la probabilité d'un défaut de la Grèce. L'Irlande est en proie aux difficultés éprouvées par ses banques, passées sous contrôle public un peu plus tôt dans la crise, de telle sorte que les risques de solvabilité du système bancaire et du pays ne font plus qu'un. La bonne nouvelle est que le gouvernement n'a pas besoin de financement sur les marchés obligataires avant mi-2011. Mais la mauvaise est que le système bancaire fait déjà l'objet d'une fuite des dépôts. Ainsi, la BCE a dû soutenir les banques irlandaises en leur offrant un financement à court terme, le cumul reçu par l'Irlande représentant désormais 130 milliards d'euros, soit un quart du total des financements apportés par la BCE." "Un sauvetage du FMI implique des conditions douloureuses à respecter. L'un des sacrifices sera probablement le taux d'imposition de 12,5% des entreprises, qui devrait être augmenté. Il est possible que les salaires du secteur public soient réduits, les prévisions de croissance du PIB réel devant être sensiblement revues à la baisse. Cela pourrait marquer le début de la rédemption, mais cela risque d'être un processus long et douloureux. Il n'est plus possible de dévaluer la livre irlandaise pour stimuler les exportations et assurer une reprise économique rapide. Bref, il ne s'agira pas d'une reprise similaire à celle de l'Asie - on est probablement plus proche du cas de la Lettonie, autre économie liée à l'euro. Si la reprise en Irlande ressemblait à celle de l'Asie, on serait dans le cas de Hong Kong, qui a subi un ajustement douloureux des prix des actifs (et de l'emploi) et non du taux de change. Si l'Irlande peut éviter l'effondrement de 20% du PIB et le chômage de 23% subi par la Lettonie, la route promet néanmoins d'être longue et difficile." AUT/ALO