Nous continuons à escalader la grande muraille des inquiétudes (CCR AM)

27/01/2011 - 16:40 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Au plus bas des marchés, le sentiment de peur est à son paroxysme et les inquiétudes sont toujours nombreuses. Les cours ne reprennent le chemin de la hausse que lorsque ces inquiétudes commencent, une à une, à se dissiper. Au plus bas des marchés, l'économie est en récession, les investisseurs doutent de la capacité des stimulations fiscales et monétaires à la faire redémarrer. Quand l'économie se retourne et que les économistes commencent à réviser leurs prévisions à la hausse, l'inquiétude principale porte sur la solidité de la reprise", note CCR AM. "S'agit-il d'un simple restockage cyclique avec le risque d'un retour en récession (double-dip) ? Lorsque l'économie continue à s'améliorer, les investisseurs se disent que les bénéfices ne se reprendront pas assez pour justifier le prix des actions et quand les bénéfices surprennent à la hausse, ils pensent que la reprise se fera sans emploi ; enfin quand l'emploi repart, l'inquiétude est que ce ne sera pas soutenable." "Une inquiétude succède à une autre, et c'est au fur et à mesure de la dissipation de chacune que les marchés progressent. De ce point de vue, le marché haussier que nous connaissons depuis mars 2009 paraît ressembler furieusement à tous les autres : nous continuons simplement à escalader la grande muraille des inquiétudes. Cette escalade du mur des inquiétudes est à mettre en parallèle avec trois cycles, qui sont autant de forces pouvant influer sur l'évolution du marché : le cycle émotionnel de l'investisseur, le cycle du crédit, et le cycle présidentiel." "Au fur et à mesure que les inquiétudes se dissipent, l'état d'esprit de l'investisseur passera de l'état de désespérance qui accompagne généralement les plus bas du marché à un état de simple déprime, qui se transformera progressivement en espoir, en soulagement, puis en optimisme. Ensuite, si les marchés continuent à progresser alors que les dernières inquiétudes s'évanouissent, l'optimisme se transformera progressivement en excitation puis en euphorie." "Cet état d'esprit émotionnel de l'investisseur se matérialisera dans son portefeuille par une prise de risque progressive : d'abord le monétaire et les obligations d'Etat, puis des obligations d'entreprises bien notées, ensuite des obligations d'entreprises à haut rendement et enfin des actions. La question est de savoir quand ces émotions se matérialisent en actes, c'est-à-dire en flux concrets entrant sur le marché." "L'analyse des flux des investisseurs sur 2010 montre que les investissements obligataires ont été largement privilégiés, au détriment des actions, notamment dans les pays développés. Nous ne sommes vraisemblablement pas encore entrés dans la phase d'optimisme. Cela pourrait être le cas en 2011, si le cycle que nous suivons est un cycle normal." "En effet, la banque UBS a réalisé après l'éclatement de la bulle internet une étude montrant que les investisseurs privés étaient revenus sur les actions à partir de 2005. 2003, l'année du rebond (les marchés ont trouvé leur plus bas en mars), a été une phase d'observation, que les investisseurs ont vécu de l'extérieur, car ils étaient toujours investis en cash. Un peu à l'image de 2009." "2004, caractérisée par une forte volatilité, les investisseurs se demandant si la reprise pouvait être tenable (un peu à l'image de 2010), a été la phase de confirmation, les marchés actions terminant finalement l'année dans le vert." "2005 avait été l'année de l'action, avec le retour effectif de flux positifs sur les actions. 2011 pourrait-elle rimer avec 2005 ? Si 2008 a incontestablement été l'année du monétaire et des obligations d'Etat, 2009 celle du crédit Investment Grade, 2010 celle du High Yield et de la dette émergente, 2011 serait-elle l'année des actions ?" "Les investisseurs ne sont cependant pas les seuls acteurs sur le marché. Les entreprises ont généralement le choix entre deux sources de financement : émettre de la dette ou émettre des actions. Le choix de l'une ou de l'autre est rarement anodin : une entreprise et ses dirigeants cherchent avant tout à maximiser leur profit, qu'il soit financier ou émotionnel : prestige, pouvoir, mégalomanie, etc." "A ce stade du cycle, il est intéressant de constater que les entreprises ont tendance à préférer émettre de la dette plutôt que des actions, comme en témoignent les émissions obligataires record de 2010, notamment sur le High Yield. Dès septembre 2010, les entreprises avaient battu le record de 2009 en termes de volume d'émissions d'obligations à haut rendement. Pour répondre à la forte demande des investisseurs, peut-être, mais sans doute également parce que cette source de financement leur apparaissait moins onéreuse qu'une émission d'actions. Ce qui est bon pour l'entreprise est cher pour l'investisseur, et vice versa..." "Comme tout autre élément de la sphère publique, les marchés financiers sont également influencés par des motivations politiques. En témoigne un phénomène statistiquement significatif et bien connu des praticiens, bien que généralement sous-estimé, voire méprisé, par les investisseurs et les économistes : le cycle présidentiel américain. En moyenne, les marchés américains (et par extension, les marchés mondiaux) ont une progression plus marquée la troisième année du cycle présidentiel, c'est-à-dire l'année précédent celle des élections." "Nous nous sommes amusés à compiler les données relatives au S&P 500 depuis 1871. La troisième année du cycle présidentiel, les marchés progressent de +10,2% en moyenne (hors dividendes), contre des progressions comprises entre +3,2% et +5,9% le reste du temps. La probabilité d'obtenir une performance positive est également plus élevée. Comment expliquer cet étrange phénomène ? Tout simplement par la volonté persistante des politiques à vouloir être réélus ! En conséquence, l'équipe présidentielle va chercher à présenter le meilleur bilan économique possible l'année de l'élection." "Deux hypothèses : soit les politiques prennent des mesures destinées à booster l'économie l'année de l'élection, ce qui est anticipé par le marché en année 3 du cycle présidentiel. Soit les politiques cherchent à prendre des mesures destinées à doper les marchés financiers (l'effet richesse), ce qui aura des conséquences positives sur l'économie l'année des élections." AUT/ALO