Les investisseurs se sont amourachés des marchés (JP Morgan AM)

14/02/2011 - 15:28 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Les investisseurs se sont amourachés des marchés avec des sentiments qui ont atteint des extrêmes. Ils avaient certes de bonnes raisons d'être optimistes, mais il semble qu'ils aient fait preuve d'un excès complaisance à l'égard de trois problèmes que nous avons pu identifier", affirme JP Morgan AM. "Le début de l'année 2011 a été pour le moins surprenant, compte tenu des turbulences observées au sein des différentes classes d'actifs et de la vive rotation dont ont fait l'objet les actions, les obligations et les devises." "C'est d'autant plus surprenant que le consensus était extrême en début d'année, on aurait même dit que tous les investisseurs étaient surpondérés en actions et sur les marchés émergents." "Mais il y a au moins une croyance qui peut être remise en cause, celle selon laquelle la Fed conservera une politique monétaire accommodante dans un avenir prévisible. Mais ne voyons-nous pas d'ores et déjà les premiers signes contraires ? Les marchés restent pour le moins complaisants à l'égard des perspectives d'évolution de la politique monétaire au cours des douze prochains mois." "Les marchés des futures ne donnent toujours qu'une petite probabilité d'un resserrement des taux d'intérêt directeurs pour l'année à venir. En effet, d'après Crédit Suisse, ils sont attendus en hausse de 38 points de base (pb) aux Etats-Unis et de 84pb au sein de la zone euro. En ce qui concerne les Etats-Unis, cet indicateur s'est apprécié de 25pb rien qu'au cours des quinze derniers jours." "La déclaration du FOMC qui a suivi la réunion de fin janvier a indiqué que la Fed resterait déterminée à poursuivre son programme d'achat de titres. Le comité a voté à l'unanimité sa poursuite afin de soutenir une économie qui reste désespérément anémique. La Fed devrait finaliser son programme d'investissement de 600 milliards de dollars d'ici le mois de juin, comme cela était initialement planifié." "Il y a pourtant au sein du FOMC de quoi faire entrer en conflit les faucons. L'économie américaine est à nouveau bien orientée, le dernier sondage ISM manufacturier ayant même atteint son plus haut niveau depuis mai 2004, le sondage ISM des services étant quant à lui sur un plus haut de six ans. Les dernières statistiques de l'emploi ont été certes difficiles à interpréter, mais il faut reconnaître que le taux de chômage a diminué de 0,8% en deux mois, tandis que le nombre d'inscriptions au chômage a reculé la semaine dernière à 383.000, son plus bas niveau depuis juillet 2008, dans le sillage de la reprise de la confiance des consommateurs." "L'indicateur avancé de notre équipe devises reste quant à lui orienté à la hausse. Le message est clair, l'économie américaine est en voie d'accélération avec une croissance qui devrait repasser au-dessus de la tendance. Les faucons de la Fed s'inquiètent des pressions dont pourraient faire l'objet les capacités de production, et ce, plus vite que prévu." "Le problème des capacités disponibles effectives a été largement évoqué par le président Bernanke lors de son audition devant la Commission budgétaire de la Chambre des représentants la semaine dernière. Il a notamment déclaré que le niveau normal du taux de chômage s'élevait probablement désormais à un niveau compris entre 5% et 6%." "La deuxième inquiétude porte sur le taux de croissance potentiel de l'économie qui pourrait être à présent significativement inférieur aux estimations initiales. Les projections économiques du FOMC mentionnées dans le dernier Rapport de politique monétaire transmis au Congrès suggèrent qu'une croissance de 2,50% à 2,75% constituerait le nouveau niveau de la tendance potentielle. Or, si l'estimation de l'OCDE qui fait état d'une croissance de 1,75% au premier trimestre 2011 devait se confirmer, l'écart de production pourrait se resserrer beaucoup plus rapidement que prévu initialement." "Ainsi, les marchés sont sans doute trop complaisants à l'égard de ces pressions sur les capacités de production ou à l'égard du taux de croissance de la tendance sous-jacente. Il suffirait qu'un seul faucon en fasse état pour que les marchés soient de nouveau contraints à s'inquiéter des stratégies de sortie." "Il est facile de se laisser emporter par les signes d'amélioration manifestes à la périphérie de la zone euro. Les spreads obligataires se sont resserrés de 60 pb par rapport à leur sommet de mi-novembre pour s'établir à 400 pb en fin de semaine dernière. Cependant, comme l'a fait observer un analyste sell-side, ce resserrement des spreads n'a pas empêché le taux de rendement à 10 ans des emprunts d'Etat du Portugal d'atteindre cette semaine son plus haut niveau depuis son entrée au sein de la zone euro, à 7,36%." "L'essentiel de cette amélioration des spreads s'explique par l'optimisme croissant des investisseurs à l'égard de l'élargissement de la FESF, qui sont ainsi confiants quant à la résolution prochaine de la crise de la zone euro. Pourtant, ils semblent ne pas avoir conscience que des taux de rendement plus élevés ne peuvent que conduire à la détérioration de la solvabilité budgétaire des pays concernés." "Le piège de la dette traduit le fait que la solvabilité budgétaire est une fonction de la différence entre les taux d'intérêt à long terme et la croissance nominale du PIB, qui détermine l'évolution de la dette publique existante par rapport au PIB. Elle est également une fonction du solde budgétaire primaire sous-jacent (solde qui exclut le service de la dette), dans la mesure où il détermine l'accroissement de la dette future. Avec un taux de 7%, la solvabilité budgétaire devient bien plus difficile à contenir et pourrait nécessiter davantage d'austérité. D'autres pourraient bien suivre la voie du Portugal." "Les taux d'intérêt en Chine augmentent à nouveau. Les autorités chinoises ont annoncé une nouvelle hausse de 25 points de base des taux d'intérêt à la fin des célébrations de la nouvelle Année Lunaire, portant les taux de crédit à 6,06% et les taux de dépôt à 12 mois à 3%. Sachant que l'économie chinoise n'est guère sensible à l'évolution des taux d'intérêt, la question est de savoir pourquoi les autorités chinoises s'en soucient." "Il y a au moins deux bonnes raisons. Il y a tout d'abord sans doute le désir de montrer qu'ils traitent le problème de l'inflation, laquelle pourrait s'élever à 5,5% sur un an lors de la publication cette semaine des statistiques de janvier. La deuxième raison tient au fait qu'il y a plus que jamais besoin de capter les excès de liquidité au sein du système bancaire. Le stock de monnaie au sens large évoluant à un taux de croissance équivalent à 36% de la taille de l'économie (par rapport à des taux de croissance équivalents de 4% au sein de la zone euro et de 2% aux Etats-Unis), la Chine pourrait bien traverser une des périodes les plus dangereuses des vingt dernières années." "Sur la base de cette mesure, le taux de croissance actuel de l'expansion monétaire est comparable à celui qui prévalait fin 1993. L'énorme abondance de liquidités à l'époque avait déclenché une inflation de 28% fin 1994. La leçon de cette histoire est que les taux d'intérêt pourraient augmenter plus tôt et davantage que prévu par le consensus et que l'on pourrait assister à une contraction massive du crédit." AUT/ALO