Taux: une lègère tension pousserait à l'achat sur le 2 ans allemand

09/03/2011 - 11:45 - Option Finance

(AOF / Funds) - "A l'issue de son comité du 3 mars 2011, la Banque centrale européenne (BCE), par la voix de son président Jean-Claude Trichet, a prévenu qu'une hausse de ses taux d'intérêt directeurs serait possible dès le mois prochain afin de contenir la remontée de l'inflation observée ces derniers mois. Cette évolution nous surprend, nos prévisions indiquaient un statu quo monétaire pour 2011", notent les analystes de Natixis AM. "L'absence de tensions sur les coûts unitaires salariaux et l'intensité de la crise en zone euro semblaient favoriser une politique plus prudente d'autant que la Réserve fédérale américaine devrait poursuivre une politique très expansionniste vraisemblablement jusqu'au mois de juin prochain. En conséquence, la hausse de l'euro et la remontée des taux risqueront de peser sur la conjoncture européenne dans la seconde partie de l'année." "Les linguistes spécialistes de la rhétorique BCE ont ainsi noté l'absence du terme approprié en référence au niveau actuel des taux, ainsi que de vigilance forte de la part des membres du conseil de politique monétaire vis-à-vis du risque d'inflation de moyen terme décrit comme orienté à la hausse compte tenu du niveau de croissance actuel. L'utilisation de vocable vigilance forte a presque toujours précédé (sauf en une occasion) une hausse de taux le mois suivant." "Il est évident que le changement de ton observé depuis plusieurs semaines aura des conséquences en termes de taux d'intérêt, probablement dès le deuxième trimestre 2011. La prévision d'inflation de la BCE pour 2012 est néanmoins parfaitement en ligne avec l'objectif puisque la Banque prévoit une inflation moyenne de 1,7% en 2012 (en milieu de fourchette). Les linguistes avaient placé à 1,8% le seuil fatidique pour un cycle de hausse. M3 (+1,5% en glissement annualisé) et le crédit ne croissent (+2,5% en glissement annualisé) que faiblement." "Selon nous, contrairement aux propos de J-C Trichet, une première hausse déclencherait nécessairement des anticipations d'un cycle de resserrement avec probablement un rythme linéaire de 25pb par trimestre. Seul un accident majeur viendrait l'interrompre. Morgan Stanley et Crédit Suisse ont modifié leurs projections de taux repo désormais à 1,75% en fin d'année. A noter que ce rythme mettrait un objectif immédiat à 2% pour le Schatz, voire 2,15% pour inclure une prime de risque et enclencherait un mouvement d'aplatissement de la courbe." "Aucun changement n'a en revanche été apporté à la politique d'octroi de liquidité aux banques : les LTRO 3 mois sont prolongées (taux révisable lié aux MRO si la BCE venait à modifier ses taux ou à repasser à des enchères) et auront lieu les 27 avril, 26 mai, 29 juin prochains. Les STRO (1 mois) et MRO (1 semaine) restent illimitées et au taux de refinancement jusqu'au 12 juillet." "Il est clair que la BCE fait peu de cas des récessions (voire dépressions) grecque, portugaise et irlandaise. La BCE ne s'intéresse pas au policy mix global de la zone euro (sous prétexte d'indépendance) ni même, et cela est beaucoup plus grave, à la stabilité financière de la zone. Le problème du resserrement aujourd'hui est l'asymétrie de la politique : la plupart des banques qui seront affectées par la hausse des taux sont celles qui sont exclues du marché interbancaire unsecured, et qui voient leur base de dépôt diminuer, ce qui les rend très dépendantes des repos avec la BCE (les banques grecques financent près de 20% de leur bilan avec la BCE, 12% en Irlande, 9% au Portugal)." "D'autre part, si le taux de défaut des ménages en Espagne reste relativement contenu, la hausse ne sera pas anodine compte tenu de l'indexation des prêts immobiliers dont la grande majorité est à taux variables dans ce pays. Le problème est le même en Irlande, sauf que les défauts sont déjà élevés." "En résumé, nous pensons que nous devons prévoir un cycle de hausse qui s'arrêtera au premier accident (+ 25pb en avril, juillet et octobre vers 1,75% fin 2011, 2,75% fin 2012). Le retour du risque systémique, déjà perceptible dans les tensions sur l'interbancaire, est possible. Le seul élément susceptible de remettre en cause le cycle de resserrement est la lutte de pouvoir entre la BCE et les gouvernements. Compte tenu du calendrier politique très chargé en mars, la BCE agiterait la menace du resserrement pour forcer les gouvernements à agir fortement en faveur d'une solution budgétaire au problème de solvabilité souveraine (extension des garanties communes, transferts fiscaux)." "Cependant, l'impact de l'annonce de la BCE sur les marchés de taux est resté limité sur la partie longue de la courbe. Les taux allemands à 10 ans, après avoir évolué de 3,25% à 3,33%, sont aujourd'hui revenus proches de leur niveau initial. Seuls les taux à 2 ans se sont tendus de 1,58% à 1,79%, intégrant deux hausses de taux de la BCE supplémentaires." "En termes de gestion, nous ne modifions donc pas notre vue légèrement négative à un mois sur le taux à dix ans allemand. En ce qui concerne la partie courte de la courbe des taux euro, une éventuelle tension supplémentaire sur les taux pourrait même nous amener à envisager une position à l'achat sur les niveaux de 2% sur le 2 ans allemand dans nos portefeuilles obligataires." "Pour ce qui concerne les OPCVM monétaires, le process intègre par nature les moyens en réponse à de telles interventions des banques centrales. Les OPCVM indexés Eonia auront une performance qui suivra naturellement, si elle se produit, la hausse de l'Eonia. Les OPCVM à allocation taux fixe/taux variable, verront sans doute celle-ci évoluer dans le sens d'une plus forte proportion d'actifs indexés sur l'Eonia. L'évolution de l'écart Eonia/Euribor 3 mois déterminera par ailleurs la performance relative par rapport à l'Eonia des OPCVM indexés sur la référence à 3 mois." AUT/ALO