BCE: la discussion sur une éventuelle hausse des taux sera serrée (Natixis)

09/06/2011 - 10:39 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Quand la BCE augmenta ses taux, pour la première fois depuis la crise, en avril dernier, la situation était la suivante : les chiffres de conjoncture, pour l'ensemble de la zone euro, étaient plutôt bons (même si cette moyenne cachait une disparité record) ; l'inflation était sur une tendance haussière, alimentée notamment par la hausse du prix des matières premières, et dépassait assez sensiblement l'objectif", note René Defossez de Natixis. "Les points morts d'inflation des linkers de la zone euro étaient très élevés (celui du Bund 10 ans avait par exemple flirté avec 2,40%) ; la crise budgétaire en zone euro était loin d'être réglée, mais le spread GGB-Bund 10 ans n'était encore que de trois chiffres." "L'euro n'était que légèrement supérieur à 1,40 dollar ; le marché avait le sentiment que la reprise de l'activité aux Etats-Unis allait être durable et solide ; la BCE affichait avec force sa volonté de normaliser sa politique monétaire, ce qui passait par une hausse des taux et, plus tard, un changement dans la technique de refinancement des banques commerciales auprès d'elle." "Aujourd'hui, la situation est la suivante : la conjoncture de l'ensemble de la zone euro donne des signes d'essoufflement (le PMI industrie manufacturière, qui s'affichait à 59 en février, n'était plus que de 54,6 en mai. Le PMI suit une tendance analogue, quoique moins marquée) ; l'inflation de la zone euro a continué de progresser, pour s'afficher à 2,8% en avril. Cette hausse résulte toujours du comportement passé du prix des matières premières, mais aussi de facteurs comme les fortes hausses de taxes dans les pays périphériques, destinées à réduire le déficit budgétaire." "Les points morts d'inflation des linkers européens ont baissé et les pentes des ces points morts (ou, alternativement, des swaps inflation zone euro) ont fortement augmenté. Cela traduit d'une part une inquiétude moindre vis-à-vis de l'inflation, d'autre part une préoccupation croissante vis-à-vis des perspectives économiques à court terme ; la crise budgétaire en zone euro s'est considérablement aggravée, avec désormais l'évocation de solutions extrêmes pour soutenir la Grèce (soft restructuring, rollover des souches arrivant à maturité dans les deux prochaines années, voire hair-cuts). La BCE participe activement à ces négociations." "L'euro s'affiche à 1,46 dollar. En économie ouverte, une hausse de la devise est équivalente à une hausse des taux ; les derniers chiffres publiés aux Etats-Unis, relatifs notamment à l'immobilier et à l'emploi, ont été terriblement décevants, et alimentent le spectre d'un double dip. On reparle d'un QE3 dans ce pays ; les commentaires de la BCE en faveur d'une normalisation de la politique monétaire ont été beaucoup plus discrets." "Autrement dit, les arguments en faveur de l'utilisation du terme strong vigilance, sésame à une hausse des taux en juillet, sont nettement moins évidents aujourd'hui qu'il y a quelques semaines. Parmi les facteurs qui s'y opposent, il y a aussi le fait que la BCE, qui négocie avec les pays périphériques, leur demande d'accroître leurs efforts de réduction des déficits budgétaires, leur imposerait dans le même temps des taux plus élevés... La décision (utilisation ou non de strong vigilance) sera, à n'en pas douter, un close call." AUT/ALO