Edmond de Rothschild Asset Management s'intéresse aux sociétés européennes

14/06/2011 - 15:27 - Option Finance

(AOF / Funds) - "L'ouverture au marché mondial a toujours été une caractéristique des entreprises européennes et pour beaucoup l'implantation dans les pays émergents remonte à la période coloniale. Même si le commerce intra-européen a toujours été dominant dans les échanges, la nécessité d'aller développer des exportations au-delà de ce marché est depuis longtemps présente dans leurs préoccupations. Le décollage des économies émergentes a eu plusieurs conséquences", note EdRAM. "Dans un premier temps, pour beaucoup d'entreprises, les pays émergents ont fourni des sous-traitants bon marché, mais la situation a changé. La zone émergente reste une zone de production mais de manière croissante ce sont les marchés locaux qui sont approvisionnés par des usines installées par les entreprises des pays développés. Les implantations se multiplient désormais et certaines entreprises investissent aujourd'hui plus à l'extérieur qu'à l'intérieur de l'Europe." "Les exportations ont été au coeur de la croissance sur les marchés, mais les investissements directs dans les pays émergents prennent désormais le relais avec des montants très élevés. La contribution à la rentabilité globale des bénéfices tirés de ces activités commence à être réellement significative, en particulier pour les sociétés arrivées au stade où les premiers investissements produisent des résultats positifs. Ces montants sont en partie réinvestis dans le monde émergent, mais ils sont aussi rapatriés en Europe et contribuent à financer les dépenses de recherche et l'investissement dans des unités destinées aux produits à forte valeur ajoutée." "Le cycle mondial de l'investissement que la crise a interrompu pendant deux ans a repris à un rythme soutenu. Les besoins sont considérables et vont des transports à l'énergie et aux équipements collectifs. Les moyens d'en assurer le financement sont à nouveau disponibles auprès d'un vaste groupe d'investisseurs dans des conditions de coût favorables qui entretiennent le phénomène. Les programmes qui avaient été suspendus ont été repris." "Dans ce domaine vaste et divers, l'offre européenne est traditionnellement très concurrentielle en termes industriels (qualité et type de matériels proposés). En dépit de l'évolution de l'euro face au dollar, beaucoup d'exportateurs européens ont su s'imposer face à leurs concurrents américains (Airbus n'est qu'un exemple). Face au Japon, le change avantage les Européens." "La réputation des produits européens auprès d'une classe moyenne émergente en forte progression, le rôle des marques et la capacité des entreprises à les imposer sur les marchés, est un autre facteur de la réussite. Les succès abondent mais certains échecs ont été retentissants et incitent les grands et moins grands acteurs européens à intervenir sous d'autres formes que l'investissement à partir de zéro." "L'organisation de la distribution peut se révéler délicate et les contraintes locales (rigidité de la réglementation, aspects politiques) peuvent fluctuer de manière imprévisible et négative. L'exemple récent d'Unilever en Chine, empêché d'augmenter ses prix sur décision administrative, montre les difficultés concrètes d'un développement autonome." "Les secteurs du luxe doivent être mentionnés en priorité compte tenu de leur fort développement et de leur grande visibilité. Le succès de LVMH sur le haut de gamme et le développement de son outil de distribution sont exemplaires. La multiplication des implantations et l'image de la société ont assuré la réussite d'une stratégie qui a aussi emprunté la voie des acquisitions. LVMH, Gucci et Richemont ont été à l'avant-garde des sociétés européennes, mais ils sont loin d'être les seuls ou même d'être les plus importants tant le phénomène est général et touche tous les secteurs." "Avec des fortunes diverses, la distribution européenne s'est intéressée aux pays émergents. Si Metro a mené à bien son expansion en Europe centrale et orientale, la Chine s'est révélée comme un terrain d'expansion difficile pour beaucoup de chaînes étrangères. Dans l'ensemble, les biens de consommation sont une catégorie où les réussites prennent du temps, et alors que l'Oréal a su développer sa présence sur le plan mondial, Danone a connu de vrais problèmes en Chine mais a fini par les résoudre." "Le positionnement dans la partie supérieure du spectre des prix a souvent constitué un atout permettant d'éviter la concurrence par les prix de producteurs locaux n'ayant pas développé une telle image. Rémy Cointreau est un bon exemple de ce type de stratégie commerciale et la moitié des ventes de la société est réalisée en Asie (près des deux tiers de celles-ci en Chine) sur le haut de gamme. D'autres secteurs ont implanté des activités : biens intermédiaires (chimie avec BASF), énergie (gaz naturel avec BG)." "Les grandes entreprises ont eu longtemps une nette prééminence. Rares étaient les PME à chercher un relais de croissance sur les marchés émergents. Aujourd'hui, elles sont nombreuses à mener cette stratégie. Les barrières aux échanges sont moindres, la logistique s'est améliorée, les aspects réglementaires (créer une activité) sont moins complexes, ces marchés ont grandi en taille et ils vont continuer à connaître une croissance soutenue." "Autre facteur, les grandes entreprises ont cherché à aider les PME qui sont souvent leurs sous-traitants à investir là où leur propre activité se développe. Par ailleurs, beaucoup de secteurs sont devenus des secteurs véritablement mondiaux et il ne peut être question de laisser à des concurrents le champ libre sur de vastes aires géographiques en forte croissance. Ce serait leur permettre de distancer celles et ceux trop peu soucieux de sortir de leur marché domestique, fût-il de la taille du marché européen." "Au début de ces stratégies mondiales, démarrer de zéro était souvent la seule possibilité sur un marché embryonnaire où les concurrents locaux eux-mêmes étaient de faible taille sur des secteurs très dispersés. Dans certains cas, elles ont même contribué à créer le marché comme Air Liquide, présent en Asie depuis plusieurs décennies. Mais ce processus est long et semé d'embûches alors que d'autres approches permettent de réduire le temps nécessaire au développement d'une marque, à la création d'un outil de commercialisation efficace, à la constitution de parts de marché significatives." "Les voies préférées sont celles de l'association avec un acteur local bien implanté (Wanxin Optical pour Essilor), de l'achat pur et simple d'une entreprise locale (opérations de Rexel en Chine et en Inde ou de Legrand en Turquie) ou encore d'une entreprise d'un pays développé ayant bien réussi son implantation dans le monde émergent. L'acquisition de Cadbury, connu pour sa présence en Asie, par la société américaine Kraft est le prototype de cette approche, mais celle de Rhodia par Solvay appartient à la même logique. Les acquisitions par les sociétés européennes se sont nettement accélérées depuis l'année dernière. Ces stratégies comportent leurs risques propres, mais elles peuvent éviter bien des erreurs sur le contexte socioculturel et sur les réalités de la distribution locale." "Le développement des produits et des services conçus pour les goûts (et les contraintes) locaux est quoi qu'il en soit une nécessité. Penser global mais agir local n'a jamais été aussi vrai compte tenu du poids grandissant des économies émergentes dans l'économie mondiale. Celles-ci deviennent en fait un enjeu décisif dans la stratégie mondiale d'une entreprise. Les règles de la réussite n'y sont pas différentes et l'adaptation au marché reste le facteur clé de la croissance." "Les contributions des pays émergents à la croissance des chiffres d'affaires comme à celle des bénéfices ont été longtemps faibles, voire inexistantes. C'était particulièrement vrai des bénéfices lorsque l'investissement pesait initialement sur la rentabilité. Depuis dix ans, la situation a nettement changé." "Selon une estimation de la Société Générale, la contribution des pays émergents à la croissance des ventes des entreprises européennes atteignait en 2002 un peu plus de 30% de cette croissance (28% environ pour celle de la rentabilité brute d'exploitation) et ces chiffres étaient voisins de 55% en 2010. Selon la même étude, dans un délai de trois à cinq ans, ces chiffres seraient de 60% pour la contribution à la croissance des ventes et d'un peu plus de 60% pour les bénéfices. Nestlé résume ces perspectives en anticipant que 45% de ses ventes proviendront des pays émergents en 2020." "La Chine concentre à juste titre l'attention et mobilise les pays de toutes les sociétés mondiales. Certaines ont été très tôt convaincues de la pertinence d'une présence locale. Volkswagen a été un pionnier sur le marché chinois et cette stratégie a contribué fortement à la croissance du constructeur allemand. Selon certaines estimations, plus de la moitié du bénéfice de la société provient de son activité en Chine." "Les années qui viennent vont voir une poursuite du phénomène. Qu'il s'agisse des exportations ou du développement de la présence sur place, beaucoup se joue sur le marché chinois et sur ses transformations. Dans le domaine des équipements de réseau de distribution électrique, ABB a par exemple reçu plus de commandes de la part de la Chine que des Etats-Unis (13% contre 9%). Après des progressions récentes déjà rapides, une multiplication par trois des exportations à destination de la Chine est attendue. Les exportations de l'Allemagne vers ce pays sont les plus importantes des exportations européennes, mais elles ne représentent actuellement que 10% des exportations du pays." "La croissance des exportations va continuer à être importante mais ce sont dans les implantations locales que réside le levier de croissance le plus important des années à venir. L'évolution de la structure des économies émergentes va dans ce sens puisque les secteurs liés à la consommation (biens et services) vont bénéficier de la hausse du niveau de vie et croître plus vite que le PIB." "La part des investissements dans le PIB devrait baisser par un phénomène classique de rééquilibrage. La capacité à satisfaire les besoins des consommateurs (et à exporter vers les pays voisins) nécessite des implantations locales pour la production mais aussi pour la conception des produits, ainsi qu'une bonne maîtrise de l'outil de distribution." "Pour importante que soit la Chine, c'est l'ensemble du monde émergent qu'il convient de considérer, et les règles de la diversification des risques géographiques conservent leur validité. En ce sens, la stratégie ne peut être que mondiale et s'appuyer sur l'Amérique du Sud autant que sur l'Asie, l'Afrique venant plus tard." "A court terme, ces risques sont avant tout liés aux tensions sur les prix (énergie et alimentation) et la réaction des banques centrales. A des degrés divers, elles se sont toutes engagées dans un processus de durcissement progressif sur les taux et sur les liquidités. Le deuxième semestre de l'année devrait connaître un environnement de moindres tensions sur les prix (fléchissement de l'activité en Chine, anticipations plus réalistes)." "Les perspectives des sociétés européennes n'ont pas été aussi attrayantes depuis longtemps. Leur marché intérieur est en croissance modeste mais solide en parallèle avec le redressement de l'emploi. Les difficultés financières qui affectent la périphérie de la zone euro sont compensées par le dynamisme des pays qui profitent le plus de la croissance de l'économie mondiale." "La hausse des exportations continuera à entraîner l'activité et l'investissement productif, comme les chiffres l'ont récemment montré. Certaines des entreprises du continent ont pris très tôt la mesure du potentiel qui s'offrait et ont agi en conséquence. Elles sont de ce fait p