Natixis imagine des Eurobonds indexés à la croissance

08/11/2011 - 09:54 - Option Finance

(AOF / Funds) - La seule véritable solution pour sortir de la crise actuelle passe par la création d'un marché des Eurobonds, qui mutualiserait le risque souverain, et qui serait associé à un système de bonus-malus pour éviter que des passagers clandestins ne se cachent dans les cales du navire, avancent les analystes de Natixis. "Mais peut-on imaginer d'autres instruments financiers, qui pourraient aider les pays de la zone euro en difficulté ?", note René Defossez, qui rappelle comment fonctionne, aujourd'hui, cette zone monétaire. "Si, pour une raison ou une autre, un pays de la zone subit un fort ralentissement conjoncturel, il ne peut guère laisser les stabilisateurs automatiques fonctionner normalement. Au contraire, il est obligé de prendre des mesures d'austérité, profondément procycliques, pour tenter de stabiliser son ratio déficit/PIB." L'efficacité de cette politique, juge l'analyste, est en général limitée : le déficit ne se réduit guère mais ses dégâts collatéraux sont très importants ; la croissance ralentit fortement. C'est le cas par exemple de la Grèce, qui non seulement fait moins bien, en matière de consolidation budgétaire, que l'année dernière, mais qui en outre affiche un recul du PIB de plus de 5% sur un an. "Comme les cures d'austérité ne semblent pas fonctionner du premier coup, les prêtres de l'orthodoxie européenne imposent en général de nouvelles mesures pour contenir le déficit." "La croissance en est encore un peu plus affectée, et avec elle la confiance des investisseurs. Les rendements des obligations augmentent, portant le service de la dette à des niveaux insupportables. Il faut donc imaginer un instrument financier susceptible de casser cet engrenage infernal. Des obligations indexées sur la croissance répondraient en partie à ce cahier des charges. Leur principe de base serait relativement simple : le coupon serait indexé sur la croissance du PIB du pays émetteur." "Si par exemple un pays à une croissance tendancielle de 2% et s'il paie habituellement un coupon de 4% sur une maturité de 10 ans, alors le coupon payé serait de 5% si la croissance dépasse de 1 point de pourcentage la croissance de long terme, de 3% si elle se situe en dessous de la croissance potentielle de 1 point de pourcentage. L'intérêt pour les pays périphériques de la zone est évident : en cas de ralentissement de l'activité, le service de la dette baisserait, ce qui permettrait à ces pays soit de laisser les stabilisateurs automatiques fonctionner sans entrave, soit, dans certaines circonstances, de donner un coup de pouce budgétaire à l'économie." "Cet instrument réduirait a priori le risque de défaut. Partant, les pays périphériques seraient confrontés à des problèmes de liquidité nettement moins importants qu'aujourd'hui. Prenons l'exemple de l'Irlande. Ce pays affichait, avant la crise, une croissance moyenne de 5%. Toujours avant la crise, le coupon moyen était de l'ordre de 4,5% pour une obligation à 10 ans. En 2008, la croissance s'est effondrée à 8%, impliquant un coupon de 4,5 + (5-8) = 1,5%." "Bien sûr, le pays émetteur serait sans doute obligé d'accepter un floor sur le coupon, et devrait sans doute payer davantage que 1,5%. Mais le principe resterait le même, et serait en tout état de cause favorable à l'Irlande. L'intérêt de l'investisseur serait qu'un tel produit lui permettrait de parier sur les perspectives de croissance à long terme d'un pays. En effet, d'une certaine manière, le comportement de l'obligation indexée sur la croissance serait proche de celui d'une action, mais le risque serait bien moindre." "Et on voit tout de suite que, sur une perspective de long terme, il y aurait un gros intérêt à parier sur l'Irlande (qui affiche depuis le début des années 2000 une croissance moyenne de plus de 3%), la Grèce (2,4%) ou l'Espagne (2,3%), plutôt que sur la France (1,4%) ou l'Allemagne (1,3%). Enfin, le dernier intérêt des obligations indexées sur la croissance, et peut-être le plus important, serait leur rôle stabilisant pour la zone euro. Puisque ces obligations réduisent le risque de défaut et le risque de liquidité, elles auraient peut-être permis d'atténuer considérablement l'impact de la crise actuelle. Elles n'auraient toutefois pas fait de la zone euro une zone monétaire optimale." AUT/ALO