BCE : changement de braquet attendu par le marché (Natixis)

29/11/2011 - 10:53 - Option Finance

(AOF / Funds) - "La BCE continue d'acheter des titres sans que cela n'évite la hausse des taux. Si elle ralentit la progression des rendements, elle ne parvient pas à l'empêcher. Ce n'est pas pas tant une question de montant (8,6 milliards la semaine dernière) que, sans doute, son mode d'intervention. Au lieu de défendre un niveau assumé de taux (autour de 6% pour les BTP par exemple), à l'instar d'une BNS ou d'une BoJ, elle ne fait qu'accompagner le marché, toujours uniquement dans le but officiel d'assurer une bonne transmission de la politique monétaire", note Jean François Robin de Natixis. "Faudra t-il attendre que les taux allemands soient à 6% pour assumer une vraie politique de soutien du marché obligataire (nécessaire en cette période de crise de liquidité) et donc de la zone euro ? Alors que la BCE a fait le plus dur en assumant de continuer ses achats, c'est un changement de braquet qui est attendu par le marché (l'OCDE a appelé de ses voeux une hausse de la taille de son bilan). Personne ne reproche la taille ou le contenu de son bilan à la Fed ou à la BoE, qui les mobilisent dans des proportions nettement plus importantes après tout..." "On peut penser que l'existence d'un Eurobond faciliterait également la résolution de la crise. Des Eurobonds permettraient à la BCE d'intervenir sur une courbe sans avoir l'air de soutenir un pays en particulier et elle bénéficierait de titres beaucoup plus liquides pour une vraie politique de Quantitative Easing. La transmission de la politique monétaire serait, de ce point de vue là, assurée. A l'inverse, cela en limiterait aussi l'impact sur les spreads. Or, le débat sur les Eurobonds a l'air de s'accélérer après les propositions de la Commission européenne, qui a mis sur la table dans son livre vert trois propositions (...) et le projet allemand d'un fond de refinancement." "Contrairement à beaucoup de commentaires, l'Allemagne n'est pas opposée aux Eurobonds : elle veut au préalable, et sans doute à raison, s'assurer que les budgets nationaux seront sous strict contrôle avant d'envisager toute mutualisation. M. Schäuble l'a répété (lundi, ndlr) : les Eurobonds ne doivent être envisagés qu'une fois des règles strictes sur les budgets adoptées (droit de véto de la Commission sur les budgets nationaux, Golden Rule, etc). L'Allemagne va pousser, le 9 décembre, pour une révision du Traité de l'UE en ce sens." "Après, le débat est beaucoup plus ouvert avec notamment le projet d'un fonds de refinancement (Tilgungsfonds), visant à faire revenir les dettes/PIB vers les 60%. Les visions de la CE et du think tank allemand ne sont d'ailleurs pas si éloignées. Le fonds de refinancement est ainsi finalement assez proche de la deuxième option avancée par la Commission, qui prévoit de mutualiser une partie des dettes souveraines nationales jusqu'à une certaine hauteur du PIB (les Blue Bond jusqu'à, par exemple, 60%) alors que perdureraient les titres nationaux, avec des spreads associés à chaque pays (les Red Bonds pour les titres émis au-delà de 60%)." "Le gros avantage est d'éviter le hasard moral en incitant les pays à revenir vers les 60% du PIB. Dans le projet allemand c'est un élément central pour accepter la mutualisation des dettes. L'idée serait d'instituer un fonds mutuellement garanti (via des réserves de change ou des stocks d'or), qui regrouperait les dettes au-delà des 60% de PIB, qui lui seraient transférées. Chaque pays s'engagerait à réduire celles-ci dans un délai fixé (20 à 25 ans, soit un effort compatible avec les nouveaux engagements votés dans le Pacte de Stabilité de réduire les dettes à raison d'1/20e tous les ans)." "Faute de quoi, des pénalités automatiques seraient instituées et/ou l'Etat pourrait être poussé à émettre en dehors de la protection du Fonds. Une fois remboursé, le Fonds des dettes lui ayant été transféré, chaque Etat retrouverait de la latitude budgétaire. Par rapport à l'Eurobond, ce Fonds est un peu moins fédéral en ce qu'il a vocation à être temporaire. Comme le Blue/Red Bond, cela impliquerait des coûts de refinancement supérieur pour les AAA par rapport à un Eurobond du type bonus-malus, par exemple ; d'où l'importance accordée à la crédibilité de l'engagement à réduire sa dette comme prévu préalablement." "L'avantage des deux solutions et encore plus d'un Eurobond pur, qui couvrirait l'intégralité des dettes des Etats membres (première option mise en avant par la Commission), est de résoudre la crise de liquidité actuelle et de fortement limiter (voire éliminer dans la première option) les arbitrages intra-zone euro, tout en s'attaquant à la crise de solvabilité. L'inconvénient est que cela prendra du temps notamment pour les révisions éventuelles du Traité. Un argument supplémentaire pour en accélérer la mise en place au plus vite..." AUT/ALO