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Tous ruinés ?

17/01/2011 - 14:46 - Sicavonline - Vincent Bezault


Tous ruinés ?

Lors de la conférence OFI, Patrick Artus (Natixis) a développé une vision assez noire de l'avenir.

La conférence OFI de 2011 avait pour ambition de répondre à une question : l'année qui s'ouvre sera-t-elle un very bad trip pour les investisseurs ? Parmi les sommités conviées à donner leur point de vue, Patrick Artus. Mais si d'aucuns attendaient du directeur de la Recherche et des Etudes de Natixis qu'il se montrât rassurant, ils en furent pour leurs frais. En un exposé cinglant et comme à l'accoutumée brillant, ce dernier s'est évertué à proposer une vision de l'avenir plutôt lugubre.

Venir écouter Patrick Artus, c'est parfois pour l'investisseur s'exposer au risque de voir les quelques bourgeons d'espoir qu'il ose encore après trois années éprouvantes cultiver flétrir illico presto. Et en l'occurrence, le patron de la Recherche et des Etudes de Natixis n'a pas ménagé le parterre venu l'écouter, lui et ses pairs, lors de la conférence OFI du 12 janvier au Palais Brongniart. Avec le brio qui est le sien, il a, au contraire, exhorté la communauté financière à se garder de tout optimisme intempestif. Avec des arguments frappants. Morceaux choisis...

Un optimisme de mauvais aloi

Stigmatisant le sentiment général d'un « retour [à] l'enrichissement et [à] la performance des marchés, grâce à la normalisation des économies », Patrick Artus a incité chacun à « ne pas oublier que l'on sort d'une crise extrêmement sévère » et triple, à la fois bancaire, boursière et immobilière, une crise qui, par conséquent, nécessite pour être digérée non pas quelques trimestres ou années mais plutôt « une bonne décennie », comme l'indiquent dans leurs travaux Kenneth Rogoff et Carmen Reinhart (NDLR : dans leur ouvrage « Cette fois, c'est différent : huit siècles de folie financière » ces deux économistes démontrent entre autres qu'une dette représentant plus de 90 % du PIB d'un pays réduit de 1 % la croissance de celui-ci.) Ceci posé, l'économiste de Natixis considère qu'il existe aujourd'hui « quatre ou cinq raisons pour lesquelles il faut éviter de faire des sauts de cabri d'optimisme. »

1 % de croissance mondiale en moins en 2011

Premier motif pour ne pas se bercer d'illusion : la croissance mondiale en 2011 devrait être inférieure de 1 % à ce qu'elle était en 2010. Selon Patrick Artus, la communauté financière tient pour acquis que la croissance dans les émergents est et sera forte. Mais certains chiffres battent en brèche cet a priori : « en fait quand on regarde les chiffres, que ce soient les chiffres du commerce extérieur [ou] ceux de la production » dans les pays émergents, apparaît « un retournement assez violent », à l'origine duquel se trouvent la fin du restockage -« Le restockage avait joué un rôle tout à fait central dans le boom des émergents début 2010.»- et l'inflation. « On a dans les émergents un cycle [économique] normal : il y a de l'inflation, donc les banques centrales montent les taux d'intérêt », rappelle le directeur de la Recherche et des Etudes de Natixis, ce qui provoque un ralentissement de la croissance. « Ce n'est pas une récession émergente » que prédit Patrick Artus mais la croissance des pays émergents sera au deux tiers de son niveau habituel et en Chine, la croissance routinière de la production industrielle qui s'élève ordinairement entre 17 et 18 % se situera probablement vers 12 %.

Le QE2, frein de l'économie américaine

Dans sa chasse aux idées reçues, Patrick Artus estime aussi que le fameux QE2, la deuxième vague d'assouplissement quantitatif de la FED, bride l'économie américaine, puisqu'elle a pour principal effet de faire remonter les anticipations d'inflation à long terme « et donc de faire remonter les taux d'intérêt long terme. » Conséquence : les ménages ne peuvent plus refinancer leur crédit. « Le refinancement des mortgages (les crédits hypothécaires) est en train de très vite se retourner à la baisse » et « les prix des maisons aux Etats-Unis ont commencé à baisser à nouveau avec la hausse des taux. » La politique monétaire de la Réserve Fédérale des Etats-Unis aboutit donc à re-dégrader la solvabilité des ménages américains. Et Patrick Artus d'avouer sa perplexité : « On ne sait d'ailleurs toujours pas pourquoi la FED a fait le QE2. Le lundi, [les gens de la FED] vous expliquent que c'est pour faire monter l'inflation anticipée et le mardi que c'est pour faire baisser les taux longs. Il faut qu'ils choisissent parce que l'on ne peut pas avoir les deux à la fois. » La deuxième vague d'assouplissement quantitatif n'est donc juste qu'une « très, très mauvaise idée qui est en train de maintenir la stagnation de l'activité résidentielle [outre-Atlantique]. » Un gros problème quand on n'ignore pas qu'au cours des trente dernières années, il n'y a pas eu de vraie reprise aux Etats-Unis sans reprise de l'investissement résidentiel. « Et on n'a pas de reprise de l'investissement résidentiel avec une solvabilité des ménages qui continue à se dégrader. » CQFD. Mais le ralentissement de la croissance émergente et les perspectives dégradées de l'économie américaine ne sont pas les seuls motifs d'inquiétude.

Une crise de la dette souveraine profonde

« On n'est pas du tout tiré d'affaire en ce qui concerne les dettes souveraines, » assène Patrick Artus. « Les marchés se satisfont de pas grand-chose »« d'une crise de liquidité mais d'une crise de solvabilité. » Et le chef économiste de Natixis d'expliquer pourquoi « et pourquoi cela finira mal. » « Les pays [menacés] (...) la Grèce, le Portugal, l'Espagne, la France (...) (c'est pire en France en réalité qu'ailleurs) » sont des pays désindustrialisés qui « ont forcément des déficits extérieurs puisqu'ils importent leurs produits industriels. » Dans un pays qui a un déficit extérieur, « il y a forcément quelqu'un qui se dévoue pour s'endetter et financer le déficit extérieur. Avant la crise, c'étaient les ménages qui s'endettaient (...). Maintenant que les ménages ne peuvent plus s'endetter, ce sont les Etats qui s'endettent pour financer les déficits extérieurs. Le problème est que le déficit extérieur ne peut pas disparaître puisque les pays n'ont plus d'industrie et, donc, en gros, les Etats ne pourront pas arrêter de s'endetter et donc [ils n'arriveront] pas à réduire le déficit public, donc, (...) ça va mal finir. » Mais la situation est d'autant plus compromise que les autorités européennes se trompent selon Patrick Artus de diagnostic : « Le vrai problème est que les autorités européennes confondent [cette situation] avec une crise de liquidité » qui se résout assez simplement. « Une crise de liquidité, ce n'est pas compliqué. Vous prenez un investisseur public quelconque, vous lui dites de prêter le temps que cela s'arrange, puis quand cela s'arrange, le pays rembourse l'investisseur public et s'en retourne sur les marchés. Si c'est une crise de solvabilité, que ce soit le FMI ou le marché qui prête, c'est pareil : [tous ces pays] finiront en faisant défaut, avec restructuration. Donc, ça va finir mal, et pour acheter des actions, il vaut mieux attendre que ça ait mal fini. »

Une inflation pourrie, avec la hausse des matières premières

Mais Patrick Artus n'en a pas fini avec les errements de la FED. Il ne goûte vraiment pas la 2e vague d'assouplissement quantitatif lancée par la Réserve Fédérale des Etats-Unis (NDLR : la banque centrale américaine a émis fin 2010 un nouveau programme de 600 Mds de dollars d'achats de titres du Trésor américain.), car ce faisant, la FED crée de la monnaie qui se diffuse dans l'économie mondiale, en se plaçant notamment sur toutes sortes d'actifs dont les matières premières. Avec pour résultat une montée des prix de ces dernières « sans rapport avec la demande mondiale puisque la demande mondiale ralentit. Prenez la demande mondiale de cuivre, elle ralentit considérablement, et depuis cet été, les prix du cuivre explosent. (...) C'est de la liquidité qui s'investit en matières premières. Le problème, c'est que cela aussi est très mauvais pour la croissance mondiale. » L'inflation qui résulte de cette appréciation des matières premières est « la plus pourrie qui soit, » puisqu'il s'agit d'une « inflation liée aux matières premières et sans inflation sous-jacente. » Autrement dit, les prix montent mais les salaires n'augmentent pas. « C'est une configuration épouvantablement désagréable, » avertit Patrick Artus. « Quand vous avez une inflation totale par les matières premières et pas de hausse des salaires, donc pas d'inflation domestique, [vous avez] des prélèvements sur les revenus, et [cela] va manger de la croissance. » Et selon son estimation, « cela va coûter 1 point de croissance à la zone Euro en 2011. » En outre, cette inflation pourrie « n'aide pas à réduire les dettes, » car l'inflation par les matières premières ne désendette pas. « Au contraire, [avec elle] vous perdez du revenu. » Qu'on se le dise donc, « l'inflation qui désendette est l'inflation domestique, qui vient par exemple des hausses de salaires. »

Le soutien du restockage a disparu

Enfin, Patrick Artus a tenu à rappeler que la moitié de la reprise économique de 2010 vient de la reconstitution des stocks et que cet appui à l'activité n'aura bien évidemment plus de mise en 2011. Et pour que le message soit d'une limpidité biblique, après que l'assistance en fin de conférence a répondu dans sa grande majorité au Quizz organisé par OFI AM qu'elle comptait investir en actions, Patrick Artus s'est fendu sur le mode goguenard d'un pronostic brutal : « Eh bien, ils seront tous ruinés. » La salle a ri... Jaune. Vincent Bezault

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