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L'effet pervers de l'action des banques centrales (1/2)

30/06/2020 - 11:55 - Sicavonline


L'effet pervers de l'action des banques centrales (1/2)

Le soutien des banques centrales sans conteste nécessaire pour éviter une crise économique et financière majuscule à travers le monde aura des répercussions négatives sur la société d’après Véronique Riches-Florès, économiste et fondatrice du cabinet d'analyses économiques Riches-Florès Research

VB : Véronique Riches-Florès, vous êtes économiste et fondatrice du cabinet d'analyses économiques Riches-Florès Research. Véronique, on continue d'essayer d'envisager le monde d'après. Dans un premier entretien, vous nous aviez expliqué que celui-ci ressemblerait beaucoup au monde d'avant, mais pas tout à fait en mieux. Le monde d'après, selon vos dires, sera un monde où la croissance ne sera pas folichonne. Toutefois, est-ce que ce n'est pas une conclusion un peu hâtive car il ne faut pas oublier la place prépondérante qu'occupent les banques centrales aujourd'hui et sans aucun doute demain puisque celles-ci déversent des milliers de milliards de dollars ou d'euros pour maintenir l'économie et le système financier à flot. Est-ce que ces banques centrales ne sont pas en mesure de nous sauver du marasme économique ?

VRF : Les banques centrales nous ont déjà sauvé la mise et ont permis de faire que la crise actuelle, comme celle de 2008 d'ailleurs, ne dérive pas dans une catastrophe déflationniste et dépressionniste qui aurait eu des conséquences bien plus profondes et probablement bien plus négatives. Donc, elles sont là et elles essayent de limiter au maximum le risque financier en rachetant énormément d'actifs, à peu près tous les actifs à risque, ce qui permet de donner le sentiment que nous évoluons dans un environnement sans risque, ce qui est essentiel à la stabilité financière. Et aujourd'hui face à des économies hyper financiarisées, on sait bien que si l'on n'arrive pas à se prémunir contre le risque financier, on n'arrivera probablement pas à véritablement avancer, y compris du côté des États qui pour beaucoup seraient en faillite depuis longtemps si on n'avait pas eu ces pratiques monétaires de quantitative easing. Sans ces rachats de la dette ¬de la dette des États en particulier¬ la situation serait probablement beaucoup plus périlleuse et on ne sait pas d'ailleurs exactement ce qu'elle serait, mais sans doute encore plus compliquée.

VB : D'ailleurs, certains se disent que l'on a peut-être trouvé avec ce système une martingale pour le financement des Etats. Il suffit que les banques centrales les financent ad libitum...

VRF : Oui, exactement. Aujourd'hui, on est dans une situation où beaucoup d'économistes envisagent une espèce de dette perpétuelle où les banques centrales seraient là pour financer plus ou moins directement, mais de plus en plus directement d'ailleurs, les besoins des Etats qui, eux-mêmes, s'occuperaient d'allouer ces sommes à l'économie. Donc, une fois que vous avez un bilan de banque centrale enflé de titres de la dette, vous pouvez la renouveler de manière perpétuelle, ça ne coûte pas grand-chose, de moins en moins en l'occurrence avec des taux d'intérêt extrêmement faibles. Il n'y a pas forcément de risque de perte de confiance dans la monnaie à partir du moment où toutes les banques centrales de la planète ou presque jouent à peu près le même jeu. On n'est pas face à un risque de confiance à l'égard du dollar par exemple puisque la BCE fait à peu près la même chose que la Fed ou la Banque d'Angleterre... et, en réalité, on est dans une situation où cette solution paraît probablement la plus facile, la plus évidente. Il est très difficile par exemple aujourd'hui d'augmenter les impôts. D'abord, cela ne servirait probablement à pas grand-chose d'accroître tous les impôts pour payer la dette parce qu'on a une croissance nominale très faible et qu'à partir de là toute ponction additionnelle se révèle déflationniste. C'est ce qui s'est produit ces dernières années et qui fait que les hausses d'impôts sont peu rentables en termes de rentrées fiscales en l'occurrence. On pourrait envisager une très sévère augmentation des impôts des plus riches et sans doute qu'il y aura des tentatives dans cette direction mais politiquement, c'est compliqué également, financièrement l'enjeu est important. Très peu d'Etats seront prêts à prendre le risque d'aller dans cette direction. Donc en définitive pourquoi ne pas  continuer dans cette direction de banques centrales qui jouent de facto un rôle de plus en plus important en finançant tous les besoins de nos économies.

VB : Ce que vous décrivez finalement, Véronique, c'est une sorte de mécanique bien huilée où la dette ne coûte quasiment rien puisqu'elle est financée par la banque centrale et l'Etat peut donc disposer de toutes les marges de manœuvre nécessaires afin de relancer l'économie quand il le faut. Est-ce que les choses sont aussi simples que cela ?

VRF : Non je crois qu'elles ne le sont pas et mes propos sont plutôt cyniques, mais il reflète une réalité où la pensée montante de beaucoup d'économistes. Je pense que la situation est beaucoup plus complexe que cela. On a des risques assez importants et cette action des banques centrales n'est pas sans conséquences négatives pour nos économies. Au premier rang, je dirais que ces interventions répétées des banques centrales d'abord protègent la sphère financière, ce qui est bienvenu, on l'a dit et qui est souvent nécessaire surtout en période de crise, sauf qu'aujourd'hui on est effectivement dans un contexte où la financiarisation de nos économies est extrême et, par ailleurs, vous avez un contexte économique de plus en plus incertain, ce qui n'est pas très favorable à la prise de risque économique, autrement dit à l'investissement. Donc, si vous avez du capital la première chose que vous allez faire, ce n'est probablement pas aller l'investir dans l'économie parce que vous ne savez pas de quoi seront faites la croissance de demain, les relations internationales, la demande, etc… Pourquoi alors vous ennuyez puisque vous avez un terrain d'investissement qui vous garantit des rendements pas très élevés certes, mais à risque à peu près 0 aujourd'hui. Il s'agit bien sûr du terrain d'investissement financier. Et ce qu'on constate, c'est que ces politiques de quantitative easing ou d'interventionnisme des banques centrales évincent de plus en plus l'investissement de la sphère productive au profit de l'investissement financier et cela a bien sûr un coût économique grandissant au fur et à mesure des années, c'est-à-dire qu'on a moins de croissance, moins de quoi distribuer, donc vous avez également un facteur de d'aggravation des inégalités qui est devenu évident ces dernières années.

VB : Donc, Véronique si je résume ce que vous venez nous dire la politique des banques centrales en visant à éliminer le risque financier incite les investisseurs à investir dans les actifs où elles réduisent ou suppriment le risque, ce qui pousse vers le haut la valorisation de ces actifs et ce qui se fait aussi au détriment de l'économie réelle qui voit se détourner d'elle une bonne partie des investissements, c'est bien ce phénomène d'éviction vous décrivez ?

VRF : Tout à fait. Un phénomène qui est très clair, de plus en plus visible et qui explique pourquoi la croissance a été aussi anémique et, notamment, la progression de la productivité ces dernières années et qui fait qu'avec cette faible productivité, on a beaucoup de mal également à retrouver une croissance économique nominale suffisante, en particulier pour absorber les dettes. Donc, vous voyez qu'on est dans une espèce de cercle vicieux où vous avez plus de dette, donc plus de risque financier, avec pour conséquence des banques centrales qui rachètent de la dette et qui écrasent le niveau des rendements, de la rentabilité mais toujours sans autoriser enfin sans permettre que ces pratiques finalement reviennent à l'économie réelle et c'est cela le grand danger et qui est bien évidemment un danger pour l'équilibre économique futur, pour la croissance, un danger qui également devient bien évidemment un danger sociétal avec le creusement des inégalités.

 Retrouvez la seconde partie de cet entretien ici

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