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Secteurs, zones géographiques : quels seront les grands gagnants post-covid-19 ?

12/05/2020 - 16:39 - Sicavonline - La rédac'


Secteurs, zones géographiques : quels seront les grands gagnants post-covid-19 ?

Pierre-Yves Gauthier, stratégiste et fondateur d’AlphaValue, dévoile les secteurs et les zones géographiques qui, selon son analyse, sortiront grandis de la crise qui a paralysé l’activité économique mondiale.

Vincent Bezault : Pierre-Yves Gauthier, vous êtes le stratégiste d'AlphaValue et selon vous le monde d'après sera défavorable aux actionnaires, mais il n'empêche que comme toujours, on y trouvera des gagnants et des perdants ou pour reprendre une image chère à Fernand Braudel on y constatera l'avènement de nouveaux centres en même temps que la relégation de certaines zones géographiques ou de certains secteurs en périphérie, et cela, encore une fois, d'un point de vue économique et boursier. Le titre de cette émission déflore votre prédiction, la Chine ou plutôt les entreprises chinoises ainsi que le Big data, que Shoshana Zuboff désigne comme le capitalisme de surveillance, devraient prévaloir, selon vous, dans les années qui viennent sur les marchés. Alors, commençons par la Chine et ses entreprises. Pourquoi devrait-elles, plus que d'autres, se mettre en évidence dans les prochaines années ?

Pierre-Yves Gauthier : Du côté de la Chine, le plus surprenant est la réorganisation très rapide de l'économie, au moins du secteur industriel, après cette crise sanitaire et un marché intérieur qui semble redémarrer, encore très lentement certes, il faut être clair, mais on perçoit une forte volonté de la part des autorités chinoises en faveur d'un redémarrage rapide. On anticipe l'émergence de marchés intérieurs absolument considérables, ça a été dit et répété, sauf que ce marché intérieur va s'exprimer pleinement au cours de l'exercice 2020, là où les États de l'Ouest seront encore en train de débattre des conditions de sortie de la crise sanitaire et des moyens à déployer pour régler la note.
Donc, on a cette économie dirigiste qui va plus que jamais s'imposer au reste du monde, d'autant plus qu'elle est en capacité de livrer le reste du monde. Et c'est l'une des grosses surprises finalement de cette crise sanitaire. On pensait que la Chine ne serait pas en mesure de livrer ses clients occidentaux avant l'été et il semblerait que dans un grand nombre de cas, notamment l'industrie automobile, les choses ne soient pas aussi bloquées que prévu. On a une sorte de démarrage relatif très favorable à la Chine et il faut le répéter à l'envi, la Chine c'est 1,4 milliard d'habitants et donc potentiellement un nombre élevé de consommateurs, ce qui en fait, et de très loin, le marché plus profond et donc la possibilité de faire des économies d'échelle considérables qu'on ne trouve nulle part ailleurs.

VB : Il est vrai que l'on ne peut pas ignorer la taille du marché chinois, mais l'économie chinoise reste très dépendante des marchés extérieurs. Il se trouve que la demande extérieure demeure faible et risque de le rester, même quand le reste du monde va, à son tour, sortir de confinement. Il est bien beau d'avoir des usines qui tournent, mais encore faut-il avoir des consommateurs pour acheter vos produits. Est-ce que du coup la montée en puissance de l'économie chinoise ne risque pas d'être limitée dans l'immédiat ?

PYG : Absolument. On se doit de conserver une grande humilité face aux mécanismes qui feront de la Chine une puissance à parité ou supérieure à la puissance américaine, mais il est clair que le calendrier leur est un peu plus favorable que ce que l'on pouvait anticiper il y a encore quelques mois, à la condition, c'est quand même une nuance importante, que le système financier tienne. On avait évoqué l'idée que les finances chinoises n'étaient pas particulièrement orthodoxes, c'était même un château de d'endettement. Par conséquent, les mécanismes qui font que ce financement chinois puisse être très fragilisé par la crise qu'ils ont connue sont toujours en place. On n'a pas eu de d'accident majeur sur le système bancaire ni sur le secteur immobilier, mais il est assez probable quand même que les choses soient profondément détériorées sur ce front-là. Cela pourrait même être un frein à la reprise chinoise. Néanmoins, on a déjà pu constater que les exportations chinoises laissaient de très gros surplus au premier trimestre, ce qui n'était pourtant pas a priori un trimestre facile pour eux. La « machinerie à vendre » au reste du monde a l'air quand même de fonctionner, même si elle fonctionne encore au ralenti.
Mais je pense que l'émergence de la Chine sera confirmée à la clôture de l'exercice 2020 et probablement 2021 aussi, puisque, comme on a pu le dire, la reprise économique du monde de l'Ouest sera probablement beaucoup plus lente que l'idée que s'en font les marchés.

VB : Pierre-Yves Gauthier, on a compris que d'après vous la Chine devrait à court-terme s'en sortir mieux que beaucoup et ça sera peut-être également le cas à long terme, puisque à rebours de l'idée communément admise que la démondialisation pénaliserait la Chine et ses entreprises, parce qu'elles ont été, au travers de leurs exportations, les grandes bénéficiaires de la mondialisation, on peut imaginer que le retour des frontières et la relocalisation des productions, d'une certaine manière, les favorisent, puisque dans un marché mondial beaucoup plus fragmenté, beaucoup moins ouvert, ce qui va compter finalement pour évaluer la force d'une entreprise, ce sera peut-être, en premier lieu, la taille de son marché domestique. Or, les entreprises chinoises peuvent s'appuyer sur un marché colossal, vous l'avez dit, de 1,4 milliard d'habitants.

PYG : Oui. On a tendance à oublier que la Chine peut travailler pour elle-même et elle le fait remarquablement bien dans un grand nombre de circonstances. On a tous en tête le succès en matière d'équipements téléphoniques de HUAWEI. On a tendance à moins connaître une marque comme HAIER qui a émergé et qui domine totalement la planète en matière d'électroménager. Quand la Chine redémarre et que des foyers achètent un nouveau climatiseur c'est à coup-sûr du matériel chinois, il n'y a aucun doute là-dessus. On peut évidemment faire des remarques similaires sur Alibaba, sur JD.com, qui sont des réussites absolues en matière de production de services commerciaux sur internet devenus des géants du e-commerce. On constate que la Chine dispose d'une autonomie totale sur des pans extrêmement modernes des activités économiques et que l'Empire du milieu, on l'oublie aussi, peut donner des leçons en matière de services financiers, puisqu'il a réinventé la banque et le crédit (au sens crédit consommateur) avec des outils qui sont absolument inattendus du point de vue d'une lecture occidentale du sujet. La Chine si elle tient politiquement, parce qu'on peut aussi avoir des questionnements sur cette dimension-là, devrait émerger sur les deux prochaines années comme étant une puissance encore plus installée.

VB : Quand vous parlez d'outils absolument inattendus du point de vue occidental notamment en matière de crédit, vous songez à quoi précisément ?

PYG : Notamment à des applications permettant de souscrire un crédit d'un coup de smartphone. Il suffit presque de passer le doigt sur l'écran pour déclencher une mise à disposition d'un crédit à la consommation ou inversement d'envoyer un petit excédent de ressources sur un compte d'épargne. C'est quelque chose qui est absolument inconcevable dans le monde bancaire occidental. Même s'il y a de gros progrès en matière de paiement et de simplification des paiements, on n'a pas du tout la fluidité et l'aisance d'épargne qui peut se voir aujourd'hui en Chine.
L'utilisation de ces outils ne peut cependant s'envisager qu'à la condition d'accepter une surveillance extrêmement fine du comportement du consommateur qui est un des sujets qui nous préoccupent aussi dans l'évolution de la société chinoise et occidentale.

VB : Ce qui nous amène au Big Data et au capitalisme de surveillance. On va redéfinir cette expression, le capitalisme de surveillance, c'est celui qui prospère grâce au traitement des données personnelles de chacun d'entre nous ?

PYG : Oui, c'est ce capitalisme insidieux qui a créé un actif autour des données personnelles sans jamais vraiment les acheter et se donne un droit souverain de les exploiter afin de créer les services que l'on trouve en tant que consommateurs particulièrement utiles mais dont la contrepartie est (car il y a un prix à payer) de faire une croix sur notre autonomie de pensée dans un grand nombre de cas.

VB : Oui. Parce que non seulement, et c'est ce qu'explique très bien Soschana Tuboff, nous abdiquons notre intimité mais également notre libre arbitre.

PYG : Il est largement canalisé effectivement par ces outils qu'on connait tous, puisqu'ils ont été largement déployés par Google et par Facebook, mais la simplicité d'usage et la qualité des services qui sont fournis, nous font oublier les risques que l'on prend à titre personnel et en termes de partage d'informations. Ce capitalisme de surveillance est extrêmement intéressant parce qu'un des éléments de cette dynamique est la peur et cette peur évidemment s'est beaucoup amplifiée avec le sujet de la santé et la crise sanitaire et nous savons que les consommateurs sont prêts à partager des données dans la mesure où ils ont peur pour eux-mêmes et pour leurs enfants.
Les circonstances de la crise sanitaire favorisent l'émergence de nouvelles strates de données qui sont donc de très grande valeur du point de vue des exploitants de ces données. On voit des gouvernements, y compris en France, intéressés par cette circulation d'informations en déployant des outils susceptibles de contenir le déploiement des pandémies, mais du point de vue démocratique, on constate une très grande difficulté à cerner les risques pris. Il est intéressant de noter que la communauté européenne est devenue extrêmement nerveuse à l'idée du déploiement par Google et Facebook dans les semaines qui viennent, de plateformes qui permettraient d'encadrer en quelque sorte l'information sur la santé des gens et ainsi de pouvoir contenir le risque de pandémie liée au Covid-19.

VB : Je reviens à votre idée maîtresse, Pierre-Yves Gauthier, que finalement ce sont les acteurs du Big Data qui ressortiront confortés et renforcés par le désir de sécurité qui s'exprime au sein des populations, au moment où l'angoisse chez beaucoup est maximale. D'ailleurs un sondage publié récemment par ODOXA confirme votre intuition. Selon celui-ci, 79% des personnes interrogées estiment que la France doit recourir aux caméras thermiques, 58% au Big Data, 54% au tracking et 51% à la reconnaissance faciale, afin de lutter contre l'épidémie de Covid-19. On mesure bien là tout ce que beaucoup sont prêts à sacrifier en termes d'intimité au nom de la sécurité.

PYG : Exactement. Ce qui crée des opportunités de profit effectivement significatives, non seulement pour les deux grands acteurs en place, mais pour tous les acteurs, y compris en Europe, qui pourraient émerger en fournissant des plateformes de données autour de la santé, puisqu'il devient légitime finalement de sous-traiter la coordination de l'interprétation de ces données par des tiers. La question étant de savoir dans quelle mesure à la fois un des Etats où les supra-Etats, comme l'Europe, vont être en mesure de contrôler la bonne manipulation de ces données à terme. On a des exemples malheureusement douloureux, en Inde où l'intention de départ était de mieux soigner grâce à une identification de chaque individu. Aujourd'hui on sait que ces données sont utilisées en partie sur des critères de religion et génèrent des problèmes absolument considérables. On pourrait très bien avoir en Europe une forme d'opportunité économique pour un certain nombres d'acteurs qui devienne ensuite un vrai sujet d'exploitation en termes politiques.

VB : La menace est carrément de basculer complètement dans un monde orwellien. On peut le résumer ainsi ?

PYG : Oui. Absolument. C'est ce qui a déjà été dénoncé par des médias et des travaux sur le modèle du capitalisme de surveillance, et qui est quelque chose que l'on sent venir. Mais il faut vraiment avoir en tête que la santé est un élément de basculement de l'opinion publique sur ces thèmes-là et que nous sommes donc très près de ce basculement politique vers l'utilisation des technologies pour gérer la crise sanitaire et l'on aura probablement beaucoup de mal à faire marche arrière. Donc, d'un point de vue boursier effectivement la difficulté va être de trouver en Europe les entreprises qui puissent tirer profit de cette dynamique. Aujourd'hui, on éprouve des difficultés à les identifier car ce sont plutôt des entreprises non cotées.

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