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Hausse du cours pétrole : comment en profiter ?

31/03/2021 - 09:22 - Sicavonline - La rédac'


Hausse du cours pétrole : comment en profiter ?

Après avoir touché le fond pendant le confinement saison un, les cours du pétrole ont opéré un spectaculaire rebond. Peu de doute du côté de Benjamin Louvet, gérant chez OFI AM que nous avons interviewé, les motifs de croire au potentiel d’appréciation du pétrole sont nombreux. De quelle manière un investisseur particulier peut, s’il le souhaite, exploiter cette tendance ?

Vincent Bezault : En avril 2020, le pétrole ne valait quasiment plus rien. Suite à l'effondrement de la demande mondiale consécutif à la crise sanitaire, des stocks pléthoriques se sont formés. A tel point que l'on ne savait plus de quelle manière stocker cette quantité de pétrole. Depuis cette sur-offre, la situation s'est normalisée avec un WTI et un BRENT qui ont repris respectivement quelques 80 et 70%. Ce retracement des cours ne manque évidemment pas d'interroger. Les cours du pétrole n'ont-ils pas atteint un plafond ? D'abord parce que les prix pétroliers sont maintenus artificiellement élevés par le biais de la réduction des quotas de production des membres de l'OPEP, de quelque 8 millions de barils par jour maintenus jusqu'en avril, mais sans engagement de longue durée. On sait également que la Russie prévoit d'augmenter sa production avec la bénédiction de l'Arabie saoudite. A tous ces éléments, s'ajoute le retour de l'Iran dans le jeu avec la Chine et l'Inde qui ont fait part de leur intention de se tourner vers ce producteur montrant leur insatisfaction face aux prix actuels du pétrole. Est-ce que ces différents éléments ne favorisent pas, Benjamin Louvet, le plafonnement du prix pétrole au niveau actuel voire son recul ?

Benjamin Louvet : A court-terme, le prix du pétrole a sans doute atteint un plafond parce que, comme vous l'avez mentionné, ce prix est soutenu et maintenu artificiellement. Huit millions de barils de production par jour sont volontairement retirés du marché par les pays producteurs. Que se passera-t-il si demain ces millions de barils sont remis sur le marché ? C'est simple, le marché croulera sous le pétrole et les prix s'effondreront. Ce n'est néanmoins pas du tout ce que souhaite l'Arabie saoudite. Il faut se figurer que justement les cours plafonnent parce qu'il faudra remettre progressivement ces 8 millions de barils par jour de production sur le marché, mais l'Arabie saoudite contrôle la situation. Je considère qu'elle a fait quelque chose d'historique en début d'année dont on parlera sans doute dans les livres d'histoire quand on évoquera le pétrole et cette période d'ici quelques années. La réduction volontaire de l'Arabie saoudite d'un million de barils par jour supplémentaires en plus de ce qui a été décidé par l'OPEP et ses alliés, la Russie, le Kazakhstan et les autres, fait qu'aujourd'hui l'Arabie saoudite a la main mise sur la stratégie pétrolière du groupe, que ce soit les membres de l'OPEP ou ses alliés. Pour preuve lors de la dernière réunion, la Russie et le Kazakhstan ont voulu remonter leurs productions, d'autres pays le souhaitaient également. Or, l'Arabie saoudite a tempéré leurs prétentions. En position de force, elle a la capacité de calmer les ardeurs des autres pays producteurs en brandissant la remise sur le marché immédiate de son million de barils par jour. L'Arabie saoudite leur adresse un message clair :  vous écoulerez peut-être un peu plus de pétrole, mais la probabilité que vous le vendiez 10 ou 15% moins cher est très élevée. Il y a quelques mois le ministre du pétrole saoudien a déclaré que ceux qui jouaient contre l'OPEP en faveur d'une baisse du prix du pétrole allaient se casser les dents.

De mon point de vue, nous sommes exactement dans cette logique. Evidemment, on peut constater une volatilité à court terme, car il faudra tôt au tard réussir à piloter la sortie de cette crise et la remise progressive sur le marché de ces stocks. Néanmoins, la réduction volontaire de sa production par l'Arabie saoudite a mis tout le monde au pas, la Russie, le Kazakhstan et les autres pays de l'OPEP et même les Américains parce qu'évidemment un pétrolier de schiste qui voit aujourd'hui le pétrole remonter à 70 dollars le baril peut se dire à ce niveau-là, je peux relancer les investissements, recommencer à forer, augmenter ma production et vendre davantage de pétrole pour essayer de prendre des parts de marché à l'OPEP qui produit moins. Mais les producteurs de schiste sont eux-aussi obligés de prendre en considération le fait que s'ils relancent la machine, l'Arabie saoudite remettra son pétrole sur le marché instantanément ce qui semble un motif de blocage de l'investissement dans les pétroles de schiste. Certains voyaient l'OPEP s'éteindre, elle est au contraire plus que jamais présente. A court-terme, les prix sont capés. Ils ne devraient pas beaucoup baisser parce que l'Arabie saoudite fait tout ce qu'il faut pour cela ne se produise pas. A plus long terme, je pense que le prix du pétrole est voué à s'apprécier.

VB : Quel est le vrai sujet ? Est-ce le retard pris dans les investissements dont vous aviez déjà parlé dans une précédente émission, des investissements que vous nous dites déficitaires depuis plusieurs années ?

BL : Depuis la dernière crise en 2014, les compagnies pétrolières ont systématiquement réduit leurs investissements et évidemment la crise engendrée par la Covid-19 a engendré un effondrement de ces investissements. En conséquence de quoi, nous constatons depuis maintenant 6 ans des sous-investissements par rapport aux investissements nécessaires au maintien de la production. Je rappelle que sans investissement la production pétrolière est vouée à reculer de 5% par an du fait de la déplétion naturelle. En 2015, l'OPEP estimait l'investissement nécessaire au maintien de la production à 630 Mds$ par an. Or depuis plusieurs années, les compagnies pétrolières investissent aux alentours de 400 Mds par an. Vu que ces projets portent sur 4 à 5 ans, nous manquerons de pétrole. Patrick Pouyanné (NDLR : PDG de Total) estime qu'en 2025, 10 M de barils de pétrole par jour feront défaut. Dans un rapport, l'AIE prévoit un nouveau pic de consommation du pétrole vers 2025/26 au-delà des 104 millions de barils par jour. Nos économies seront toujours dépendantes du pétrole. Pour résumer, nous avons d'un côté des investissements insuffisants et de l'autre des besoins toujours plus grands, nous allons donc manquer de pétrole et la transition énergétique n'y changera rien car sa mise en place exige du temps. Vous ne remplacez par des énergies fossiles, que sont le pétrole, le charbon et le gaz qui représente 80% de l'énergie primaire consommée dans le monde par des éoliennes et des panneaux solaires en un tour de main. Cela exige du temps pour les construire. Malgré une accélération manifeste de la transition énergétique, le mix énergétique mondial n'a quasiment pas évolué. On va avoir besoin de pétrole pendant encore longtemps. Il est indispensable que les prix remontent à des niveaux suffisamment confortables pour que certains prennent le risque de recommencer à investir dans la production de pétrole afin de répondre aux besoins actuels.

VB : Donc nous allons avoir un pic de la demande et l'offre sera insuffisante pour y répondre ?

BL : Oui, probablement vers 2026 selon l'AIE. Les prix sont condamnés à croitre. C'est le simple jeu de l'ajustement des prix en fonction de l'offre et de la demande. Si l'offre est insuffisante pour répondre à la demande vous avez deux solutions. Vous augmentez les prix pour essayer de stimuler la production et pour essayer de détruire de la demande. Il faudra donc rehausser les prix jusqu'au moment où ce sera tellement douloureux que la demande baissera. Un telle flambée des prix pourrait cependant soulever des problématiques sociales. Il est indispensable que les prix soient suffisamment élevés pour que des entreprises se disent malgré le déclin du pétrole que les prix sont suffisamment confortables pour envisager d'investir et permettre au monde de s'approvisionner en pétrole le temps de passer à des énergies propres.

VB : Est-ce qu'une hausse supplémentaire des prix du pétrole ne porterait pas en elle-même des germes de récession tuant dans l'œuf un tel processus ?

BL : On sait que la baisse de consommation ne suffira pas à compenser une offre insuffisante. Après cela peut être un mal pour un bien. On a toujours dit que l'ennemi du pétrole cher, c'était le pétrole cher. Quand le pétrole est très cher, vous avez tendance à essayer de l'économiser ce qui fait pression sur la demande. Cela pourrait peut-être accélérer la transition énergétique qui, selon moi, a pour l'instant commencé très timidement. D'après l'agence internationale de l'énergie (AIE), il faudrait qu'en 2030 on ait multiplié par quatre la production d'énergie solaire, par trois les énergies éoliennes et pour l'instant nous ne sommes pas du tout prêts. Si on veut arriver à se débarrasser des énergies fossiles, il y a un vrai travail à faire et la hausse des prix du pétrole pourrait aider à enclencher ce travail.

VB : Jusqu'à quel niveau voyez-vous les cours du pétrole monter ?  A une époque vous les voyiez atteindre les 100 dollars, est-ce toujours un objectif vraisemblable ?

BL : A ce jour, nous maintenons cet objectif de 100 $. A condition que ce montant soit atteint progressivement, ce sera gérable par l'industrie et par le consommateur d'une façon générale mais je suis pas sûr qu'on restera à ce niveau. Le marché du pétrole est un marché qu'on appelle de « boom and bust », avec des grosses phases d'accélération puis des phases d'éclatement. A un moment, on aura une prise de conscience de la gravité de la situation et une envolée des prix vers les 100 dollars avant de connaître une stabilisation probablement autour des 80 dollars, un prix, à mon sens, cohérent pour disposer d'une demande maîtrisée et une offre qui reparte grâce à des investissements suffisants pour l'assurer dans les années qui viennent.

VB : A quel horizon pourrions-nous voir les cours du pétrole progresser ?

BL : Je ne peux pas vous donner de date précise mais cela pourrait bien se produire dans les 12 à 18 mois qui suivront la fin de la crise sanitaire. A partir du moment, on l'on va commencer à apercevoir le bout du tunnel et donc la reprise économique, après avoir éliminé les stocks constitués, le marché va commencer progressivement à réaliser le manque d'offre et à ce moment-là les prix pourraient monter très vite. Si on part du principe que d'ici cet été la politique vaccinale à travers le monde commence à produire ses effets on peut s'attendre à des prix aux alentours de 100 dollars dans le courant du deuxième trimestre 2022.

VB : Comment jouer cette ascension vers les 100 $ que vous prévoyez ?

BL : Ce n'est pas évident à jouer pour un investisseur particulier. Il peut être tentant de se tourner vers les ETF indexés sur le cours du pétrole, mais ces produits sont à manipuler avec beaucoup de prudence. Lorsque vous achetez du pétrole physiquement, vous devez le stocker et ce stockage a un coût. Afin de ne pas favoriser l'investissement via un ETF, le coût de stockage est également intégré dans les coûts des ETF répliquant les cours du pétrole. Si dans les trois mois suivant l'achat d'un tel ETF, le prix du pétrole n'a pas évolué, le coût de stockage vous aura malgré tout fait perdre de l'argent, environ 10 à 15 %. Actuellement, ces coûts de stockage sont particulièrement élevés eu égard aux importants stocks de pétrole. Une autre possibilité plus traditionnelle consiste à acheter des actions du secteur pétrolier. Cette solution me semble intéressante à double titre. Tout d'abord, ces sociétés s'enrichiront face à l'éventuelle appréciation du prix du pétrole. De plus, certaines de ces entreprises, notamment européennes, ont compris la nécessité de la transition énergétique pour lutter contre le changement climatique, des sociétés comme Total, BP ou encore Shell ont amorcé ce virage et donc vont tirer parti à court terme de cette hausse des prix du pétrole mais surtout du bénéfice du virage qu'elles sont en train de prendre vers les énergies renouvelables. C'est le cas notamment de Total. Regardez aujourd'hui la valorisation d'une valeur comme Orsted. Le groupe était dans les produits pétroliers et a effectué un virage à cent pour cent vers les énergies renouvelables. Le titre Orsted s'est apprécié en bourse de plusieurs centaines de pourcents ces dernières années, là où la valeur de Total ne bougeait quasiment pas. NextEra aux Etats-Unis, un EDF local, qui produisait du courant à partir de nucléaire, de charbon a développé beaucoup de renouvelables. NextEra est aujourd'hui un des premiers opérateurs au monde même s'il lui reste à côté du nucléaire, cette valeur a gagné plus de 250% en bourse sur les quatre dernières années. Patrick Pouyanné, PDG de Total a compris la nécessité de sortir de ces énergies. Miser sur ces valeurs pétrolières européennes engagées dans la transition énergétique peut permettre de bénéficier de ce prochain mouvement haussier à assez court terme du pétrole car elles produisent encore du pétrole et tirer avantage de la transformation de ces valeurs vers les énergies renouvelables qui vont de toute façon devoir s'imposer dans les années qui viennent.

VB :  Surtout qu'il faut garder en tête que la finance a décidé aujourd'hui de verdir ses portefeuilles et d'appliquer aussi quasiment systématiquement des critères ESG. Le bénéfice pour les valeurs dites ESG sera naturellement évident. A l'inverse, toutes celles qui ne rentreront pas dans les critères risquent de connaître un sort boursier un peu défavorable.

BL : C'est une certitude. J'ajouterai que l'ESG a évolué. Nous sommes passés d'un ESG d'exclusion consistant à évincer les sociétés polluantes des portefeuilles à de l'ISR et de l'ESG d'engagement intégrant des sociétés dans l'idée d'essayer de les faire changer. Evidemment toutes les activités ne s'y prêtent pas. Chez OFI Asset Management, nous avons exclu par exemple exclu le charbon des portefeuilles. Aucune transformation n'est envisageable, cette activité doit disparaitre. Par contre investir dans une société pétrolière qui a des capacités d'investissement, qui a des avantages techniques, qui sait travailler en offshore par exemple, ce qui peut être intéressant pour le développement de l'éolien offshore, et qui a la conviction que la transition énergétique est une nécessité, investir dans ces sociétés et les aider à accompagner ce changement a du sens. Agir de la sorte apparaît plus pertinent parce que ce n'est pas en investissant dans des sociétés qui ne polluent pas que vous allez dépolluer l'économie, mais en investissant dans des sociétés qui sont carbonées et que vous allez accompagner et pousser à « décarboner ».

VB : Du point de vue de l'investisseur, il est intéressant d'accompagner ces sociétés dans leur trajectoire de transformation puisque c'est l'histoire boursière que jouera le marché.

BL : Exactement. C'est au début de cette transformation que l'investisseur peut espérer obtenir le plus de création de valeur.

VB : Pour résumer votre message, il pourrait y avoir de la volatilité à court terme sur les cours pétroliers, mais vous voyez en sortie de crise sanitaire une appréciation très sensible des cours du pétrole et vous dites que pour jouer cette tendance si jamais elle survient, ceux qui sont intéressés doivent plutôt se porter sur des titres de pétrolières intégrées et notamment des pétrolières intégrées européennes qui font le pari de la transition énergique.

BL : Tout à fait. Des sociétés qui ont commencé à faire ce pari et qui accélèrent le mouvement. Patrick Pouyanné a déclaré qu'il voulait que plus de 50% des revenus de Total en 2030 soient autour des énergies renouvelables.

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