(AOF / Funds) - L'un des fondements de la théorie financière moderne est l'hypothèse de l'efficience des marchés selon laquelle un titre financier s'échange à un cours égal à sa valeur fondamentale. Les théories de la finance d'entreprise, formulées au moyen de cette hypothèse, décrivent les décisions financières des entreprises comme le résultat de leurs caractéristiques fondamentales. En particulier, s'agissant des choix de financement, les théories classiques soulignent l'importance des économies d'impôts liées à la dette, des coûts de faillite, de la volatilité des cash-flows, des conflits d'agence ou encore de l'asymétrie d'information. Les tentatives de validations empiriques de ces théories n'aboutissent toutefois pas à des résultats satisfaisants, conduisant les chercheurs à remettre en question l'hypothèse centrale de l'efficience des marchés et à envisager des explications s'apparentant au domaine de la finance comportementale. Si les cours des actifs s'écartent de leurs valeurs théoriques, autrement dit, si risque et rentabilité ne vont plus de pair et si ces écarts sont durables, les entreprises disposeraient de fenêtres d'opportunité durant lesquelles elles pourraient se financer à moindre coût, par exemple en émettant des actions surévaluées. Les limites de l'arbitrage et/ou l'irrationalité des investisseurs peuvent mener à l'existence et à la persistance de telles erreurs de valorisation. En effet, les contraintes sur les ventes à découvert, légales ou liées à l'aversion au risque, les objectifs de diversification ou encore les contraintes budgétaires constituent autant d'entraves à un retour rapide vers les prix d'équilibre. En outre, l'avantage informationnel dont les dirigeants vraisemblablement disposent leur confère la possibilité de détecter les fenêtres d'opportunité et d'en tirer profit (timing). Ceci est confirmé par les volumes anormalement élevés des positions vendeuses des dirigeants sur les actions de leurs sociétés détenues à titre personnel, autour des émissions d'actions. Le succès de leurs transactions s'illustre par la dépréciation ultérieure des cours. De surcroît, certains dirigeants n'hésitent pas à manipuler leurs résultats avant les émissions d'actions afin de soutenir la surévaluation. Le timing permet d'expliquer de nombreux constats. Les vagues d'augmentation de capital et d'introductions en bourse (IB) coïncident généralement avec des périodes de fortes valorisations. Les montants des fonds levés en période de forte activité (volume d'IB) sont significativement plus élevés. De plus, les émissions d'actions font suite à des périodes d'appréciation anormale des cours et inversement, les rachats d'actions sont précédés par des rentabilités anormales négatives. Les entreprises ont même tendance à annuler leurs programmes de rachats ou d'émissions si la réaction du marché lors de l'annonce corrige le déséquilibre des cours. Le timing semble également influencer d'autres décisions financières. La sous-évaluation conduit les entreprises à opter pour le rachat d'actions, alors qu'en cas de surévaluation elles se tournent vers les versements de dividendes. Le choix de la maturité de la dette semble davantage lié au niveau des taux d'intérêt et au term-spread qu'à l'exposition au risque de taux. Sur le marché des fusions-acquisitions, les acquéreurs souvent surévalués, privilégient un règlement par actions plutôt que par cash ainsi que le rachat de cibles sous-évaluées. Ces comportements opportunistes sont-ils créateurs de valeur ? Bien que les réponses soient contrastées, il semble que les émissions d'actions soient généralement suivies par une sous-performance du titre (de l'ordre de 30 % sur trois ans) indiquant un transfert de richesse des actionnaires entrants vers les anciens actionnaires. Les programmes de rachats d'actions sont, à l'inverse, suivis par une surperformance à long terme, d'autant plus affirmée que la part du capital rachetée est importante. Il convient de reconnaître que ces résultats doivent être nuancés. Au timing s'opposent des explications rationnelles invoquant notamment les changements du niveau de risque subis par les émetteurs, suite à la baisse de leurs ratios d'endettement ou à l'exercice de leurs options d'investissement. Finalement, le timing s'avère être un critère majeur du choix de financement. 67 % des dirigeants américains et 59 % des dirigeants européens déclarent fonder leurs décisions financières sur les imperfections du marché. Par Salma Kasbi, attachée d'enseignement et de recherche, université Paris-Dauphine
Les performances passées ne préjugent pas des performances futures. La valeur de l'investissement peut varier à la hausse comme à la baisse.
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